Haïti: Témoignage de Serge Pierre Louis, trente-quatre ans après le coup d’État sanglant du 30 septembre 1991

Haïti: Témoignage de Serge Pierre Louis, trente-quatre ans après le coup d’État sanglant du 30 septembre 1991

C’est donc au professeur Esaü Jean-Baptiste que je dedie ce TÉMOIGNAGE. C’est en lisant et relisant ses livres que j’ai pris la décision de faire ce témoignage au nom de la vérité historique.

D’ailleurs peu de jours avant le coup d’État du 30 septembre 1991, Pierre Clitandre avait écrit qu’il mourrait aux côtés d’Aristide au Palais. D’autant plus, nous étions nombreux qui craignîmes cet événement.

Avec l’aide de Guy Alexandre, à l’époque Ambasssadeur d’Haïti en République Dominicaine, nous ‘monitorâmes’ point par point les étapes et démarches qui devaient aboutir au succès du coup. J’ai jusqu’à ce jour très peu parlé de cet échec du mouvement qui avait porté Aristide au timon des affaires du pays.

Le jeudi , soit trois (4) jours avant, Aristide n’était pas encore rentré de New York (ONU), c’est moi qui apportait au Palais pour René Préval (PM) dans une feuille l’imminence du coup décidé à Santo Domingo.

Même au retour le samedi, et que c’était devenu un secret de Polichinelle (sauf pour les maris cocus) Préval continua à dire: “si nou tap koute rimè Titid pa tap menm al Nasyon Zini”. [Aristide n’irait même pas aux Nations-unis, si on écoutait les rumeurs de Coup d’État] Bon, ça pouvait même me coûter la vie.

Si P. Clitandre n’était pas 100% sincère, pour moi, c’était absolument inacceptable; tenant compte que le peuple haïtien avait beaucoup misé sur le 16 décembre 1990 dans l’espoir d’un mieux être. À regarder en arrière… À deux reprises, j’aurais pu mourir, laissant ma peau.

Dans la nuit (la veille 29 au…), nous étions quatre (4) [LMD, RB, le chauffeur F et moi] dans une voiture, nous prîmes la direction du Palais National. Nous arrivâmes juste à l’entrée, le projecteur s’était déjà allumé sur la voiture. J’avais beaucoup insisté pour être à l’intérieur, quand Aristide, à travers la radio communication de tout le gouvernement lança: allez dormir et faites de beaux rêves (en français). C’est ainsi que R. dit: puisqu’il le dit…

Dans l’après-midi, c’était quasiment consommé, je me retrouvai à Bourdon, et me dis pas question, et je filai vers le Palais. Je vis plein de militaires en bleu devant le Quartier Général de l’Armée. Je continuai pour Monseigneur Guilloux. Je tournai à gauche. Je m’apprêtais à traverser rue des Casernes quand un squad (sorti du Q.G de la Police) de toutes sortes de miliaires me barra la route et se mit en position tactique (à plat ventre) armé de Galil déversa des salves de balles sur la Palais.

Ce qui me sauva ? Des amis de cette rue Quartier (dèyè lapolis)  qui me virent débout devant la DGI crièrent à haute voix: «Serge vini». Où je restai pour cinq jours. Je dois signaler que je fus pendant un bon temps impresario du groupe musical «Les Loups Noirs» dont le siège se trouvait à ce bloc dit Rue Katye. Hommage aux frères Lalanne. Comprenez aussi que ce fut un gouvernement d’enfants de cœur.

 

Serge Pierre-Louis

(SPL)

30 septembre 2025

LAISSEZ UN COMMENTAIRE

0 COMMENTAIRES