C’est un tournant historique aux conséquences potentiellement dévastatrices pour l’économie haïtienne. Les lois américaines HOPE (Haitian Hemispheric Opportunity through Partnership Encouragement) et HELP (Haiti Economic Lift Program), en vigueur depuis 2006, ont officiellement expiré le jeudi 2 octobre 2025, sans renouvellement par l’administration Trump.
Ces dispositifs permettaient aux entreprises haïtiennes, principalement dans le secteur textile, d’exporter vers les États-Unis sans droits de douane. Grâce à ces avantages, des marques internationales telles que Hanes, Calvin Klein ou Victoria’s Secret avaient investi dans le pays, générant plus de 50 000 emplois directs et stimulant une industrie qui représentait près de 90 % des exportations nationales.
Désormais, les produits haïtiens seront soumis à des droits de douane pouvant aller de 20 jusqu’à 30 %, mettant en péril la compétitivité du pays face à des voisins comme le Honduras ou le Nicaragua.
Pour l’économiste Joseph Arold Pierre, cette décision pourrait entraîner une cascade de fermetures d’usines, des licenciements massifs dans les zones franches, et une chute vertigineuse des devises étrangères. « Le secteur textile rapportait près d’un milliard de dollars par an. Sans HOPE/HELP, Haïti perd son principal levier économique », alerte-t-il.
Au-delà des chiffres, les conséquences sociales pourraient être dramatiques. La fin des lois préférentielles risque d’aggraver la pauvreté, de renforcer l’instabilité sociale et de faciliter recrutement par les gangs armés, déjà très actifs dans les zones urbaines.
Le Conseil présidentiel de transition (CPT) et plusieurs diplomates haïtiens avaient tenté un plaidoyer pour le maintien du programme, mais leurs efforts n’ont malheureusement pas été abouti. Ce non-renouvellement est perçu comme un revers diplomatique majeur.
Avec un secteur touristique à l’arrêt et un investissement direct étranger quasi inexistant, Haïti dépendait essentiellement des exportations textiles et des transferts de la diaspora, estimés à 4 milliards de dollars par an. Or, les importations atteignent 6 milliards, creusant une balance commerciale déjà déficitaire.
Des investisseurs américains avaient installé plusieurs usines, notamment au Parc industriel de Caracol. Le secteur textile, qui produisait pour de grandes marques internationales, représentait près de 90 % des exportations haïtiennes.
La Banque de la République d’Haïti (BRH), qui mène depuis juin 2023 une politique de stabilisation du taux de change, pourrait voir ses marges de manœuvre réduites. Sans afflux de dollars, la gourde risque de se déprécier, et l’inflation pourrait s’emballer. « Si les transferts de la diaspora diminuent, la BRH ne pourra plus intervenir efficacement sur le marché des changes», prévient Joseph Arold Pierre.
L’économiste souligne que, ce désengagement américain ne fait que refléter la réalité d’un pays en détresse, sans vision stratégique ni capacité de négociation. À ce niveau, la fin des lois HOPE/HELP en Haïti pourrait sans doute porter un coup fatal au secteur textile, dans un pays déjà confronté à une crise socio-économique profonde, une insécurité généralisée et une paralysie institutionnelle.
Likenton Joseph