Une machine électorale douteuse, branlante, veut avancer et les bénédictions de l’international, toujours soucieux de justifier plans et dépenses, confortent à la fois ceux qui sont aux commandes et certainement aussi ceux qui croient que, dans le climat actuel de violence, où les citoyens dans leur grande majorité manifestent leur peu d’intérêt pour ce qu’ils considèrent être comme une future farce, ils peuvent placer quelqu’un du sérail pour la continuité.
Quel dirigeant haïtien ou étranger n’a pas souhaité une continuité au pouvoir ? Sauf que, pour le peuple et les dirigeants, la continuité a des significations bien différentes. Pour nos dirigeants, la continuité veut dire, des privilèges en veux-tu en voilà pour des années supplémentaires, le contrôle absolu des ressources nationales et leurs partages entre des groupes de plus en plus fermés. La continuité devrait vouloir dire pour la population un appui à un pouvoir qui travaille dans le sens de l’amélioration des conditions de vie de la population. La continuité devient un rapport de confiance entre dirigeants et dirigés. Dans cette continuité, logiquement, les dirigeants qui ont déjà fait leurs preuves n’ont plus besoin de déployer tout un arsenal de persuasions, jusqu’à aller vers la violence, l’alliance avec les gangs, l’abandon de notre souveraineté et donc l’illégalité pour s’assurer que rien ne change.
François Hertel écrivait : « Nous sommes ainsi faits que nous ne possédons d’autres facteurs de continuité et de cohérences que les instincts de notre personnalité » Nous sommes dans un lieu où nous ne rêvons pas de métamorphose du réel, où nous nous encanaillons dans une lutte quotidienne pour échapper à la précarité. Et cette lutte est si féroce que les instincts qu’elles modèlent perdurent même quand on aurait forcé la frontière vers les territoires de l’abondance. Comme alors n’existe que cette chasse individuelle à l’abondance, il n’est nul besoin de penser à une quelconque transformation des êtres et des choses pour une meilleure prise sur le réel. Il suffit de garder le statu quo en restant aux commandes. La continuité peut alors devenir une véritable menace pour la sécurité publique et pour l’avenir de la nation, car elle devient de l’immobilisme au profit d’une minorité seulement.
Dans la partie qui se développe sous nos yeux, c’est la passivité et l’apparent manque d’intelligence de toute une classe politique qui semble se remettre une fois de plus à l’étranger, pour qu’on aboutisse à une continuité préjudiciable à notre société. Si la précarité et la misère dans lesquelles patauge notre population ont été utilisées par nos délinquants politiques, cette même précarité à laquelle s’ajoute une insécurité meurtrière peut forcer notre peuple à éjecter cette classe politique qui n’a rien à son actif.
Gary Victor
