Le dernier rapport du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), publié en application de la résolution 2785 du Conseil de sécurité, dresse un constat alarmant sur la situation du système pénitentiaire haïtien. Le document, qui couvre la période suivant le précédent rapport du 27 juin 2025, met en lumière une crise humanitaire profonde dans les établissements de détention du pays.
Une surpopulation carcérale dramatique
Selon le BINUH, les prisons haïtiennes font face à une surpopulation critique, aggravée par un manque d’aération, des pénuries alimentaires et un accès très limité aux soins de santé. Ces conditions inhumaines ont entraîné un nombre croissant de décès parmi les détenus.
À la prison de Jacmel, treize prisonniers ont perdu la vie en juillet dernier, victimes de la chaleur extrême et de la promiscuité. Conçue pour accueillir 139 personnes, cette prison héberge actuellement 779 détenus, dont 36 femmes. Près de 81 % d’entre eux sont en détention préventive, et l’espace vital ne dépasse pas 0,14 mètre carré par individu.
À l’échelle nationale, le BINUH dénombre 7 235 détenus au 10 septembre, dont 399 femmes, 247 garçons et 31 filles. Plus de 81 % (5 894 détenus) n’ont toujours pas été jugés. Le taux d’occupation des prisons atteint désormais 299 %, avec un espace individuel réduit à seulement 0,34 mètre carré par personne.
Une crise sanitaire aggravée
Le retrait récent d’un prestataire international de soins médicaux en milieu carcéral a accentué la crise sanitaire. Face à cette situation, le BINUH a coordonné, le 8 août dernier, une réunion d’urgence avec la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP) et le Ministère de la Santé publique, lit-on. Cette rencontre a abouti à l’élaboration d’un plan d’action et à la mise en place d’un protocole d’accord entre les deux institutions afin de renforcer la gestion des données sanitaires et d’améliorer l’accès aux soins pour les détenus.
Le rapport mentionne également la collaboration du BINUH et du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) pour soutenir les autorités judiciaires dans l’organisation d’audiences pénales pour les mineurs détenus dans les 18 juridictions du pays.
Toutefois, les évasions massives enregistrées entre 2022 et 2025 dont celle du centre pénitentiaire pour femmes ont réduit de 44 % la capacité carcérale nationale. Le seul centre encore fonctionnel, à Port-au-Prince, conçu pour 90 mineurs, accueille aujourd’hui plus de 600 détenus de toutes catégories.
En raison du contrôle exercé par les gangs et du manque de ressources, la réouverture des autres établissements reste improbable. Le ministre de la Justice a ainsi approuvé une proposition du BINUH visant à créer une unité spéciale, avec l’appui de partenaires nationaux et internationaux, pour améliorer les conditions de détention, bâtir des infrastructures durables et assurer la gestion des détenus à haut risque.
Vladimir Predvil
