Le Nicaragua, nouvelle destination de transit pour les Haïtiens

À l'Aéroport international Toussaint Louverture, des centaines de jeunes prennent le vol presque tous les jours vers le Nicaragua, un fait constaté depuis plusieurs semaines a confié un employé de la compagnie d'aviation  Air-Caraïbes. Cette nouvelle destination est considérée comme transit pour ces jeunes en fuite contre l'insécurité, la mauvaise gouvernance, le chômage, entre autres avec l'espoir d'atteindre un jour le territoire américain. Selon plus d'un, il est préférable d'aller vivre ailleurs dans des conditions difficiles que de vivre dans le terroir, sous la violence des gangs ainsi que sous les regards indifférents des autorités étatiques. 

11h du matin,  beaucoup de mouvements à l'intérieur de l'Aéroport international Toussaint Louverture. Les va-et -vient se multiplient, les derniers arrangements sont en cours pour finaliser et vérifier les documents des voyageurs. Contrairement à certains moments de l'année où les activités ont baissé pour les compagnies aériennes, Sunrise, Air-Caraïbes et d'autres lignes aériennes ont vu l'effectif des passagers augmenter en raison d'une nouvelle vague de voyageurs vers le Nicaragua. «Ce sont entre 300 à 500 personnes qui laissent Port-au-Prince à destination du Nicaragua», a confié un employé de la compagnie Air-Caraïbes à la rédaction du journal Le National.  Depuis plus de 15 jours, il y a une forte demande de billets pour le Nicaragua et c'est pareil pour les autres compagnies aériennes, a-t-elle ajouté. 

Julien (nom d'emprunt), un trentenaire qui n'a pas voulu citer son nom dans les médias, indique qu'il est à l'aéroport en partance pour le Nicaragua. Il a dépensé $ 3 500 dollars américains, une somme proche de 500 000 gourdes, suivant le taux du jour publié par la Banque de la République d'Haïti, ce mercredi 6 septembre 2023. Pour organiser ce voyage, Julien confie qu'il a seulement utilisé son passeport comme document auprès de l'agence de voyages qui l'accompagnait. «Nous voulons vivre, mais rien ne marche ici. Notre plus grand obstacle c'est l'insécurité. Nous avons fait des efforts, nous avons utilisé tous nos moyens pour essayer de vivre dans le pays, mais l'État en complicité avec les gangs nous met à la porte. Mieux vaut quitter le pays et vivre ailleurs dans des conditions difficiles que d'être victimes du kidnapping et courir sans savoir où aller à cause de la violence des gangs. Regarder ce qui se passe récemment à Canaan,  à Carrefour-Feuilles et dans les autres endroits qui sont contrôlés par les groupes armés. On a assez souffert, on a vécu l'enfer, partir et laisser notre chère Haïti est nostalgique, mais on doit le faire pour notre bien-être », a-t-il déclaré d'un air froid et triste.

Samuel, un jeune homme prenant part également à ce voyage vers Nicaragua explique qu'il est obligé de quitter le pays sous les pressions de ses parents, qui sont constamment dans l'inquiétude par rapport à la dégradation du climat sécuritaire du pays. «Je n'ai pas d'autre choix, notre avenir est menacé, il y a une absence totale d' opportunités. On ne peut pas oser rester dans un pays qui tue ses fils.  Le Nicaragua n'est pas une destination finale. Je serai de passage.  Je vais passer moins de 90 jours. Aux jeunes qui décident encore de rester en Haïti,  je leur souhaite davantage de courage. Partir est mieux que rester», soutient-il. Originaire de Carrefour, Samuel soutient que ce choix est fondamental pour sa survie, après les différentes attaques perpétrées par des hommes armés dans ladite commune.

Par ailleurs, la migration haïtienne vers les pays étrangers se poursuit dans un contexte assez particulier.  Les citoyens expriment leur ras-le-bol face à la situation lamentable du pays, dont l'insécurité, la cherté de la vie et les perturbations politiques. Entre autres, ils dénoncent l'incapacité du gouvernement face à la détérioration de la situation où les gangs armés contrôlent une bonne partie du territoire, dont la majeure partie de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. 


 

Oberde Charles

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