Carnage à Canaan : des organisations de défense des droits humains exigent que les responsabilités soient fixées

Une manifestation visant à déloger le gang dirigé par Jeff à Canaan, un quartier de la capitale, a tourné au carnage le samedi 26 août 2023. Sous la direction du pasteur Marcorel Zidor, surnommé pasteur Marco, des fidèles de l'église Piscine de Bethesda ont pris part à cette marche, munis de couteaux, de pierres et de machettes. La violence déployée par les bandits a rapidement transformé la manifestation pacifique en un véritable massacre.

Les images publiées sur les réseaux sociaux témoignent de l'ampleur de la tragédie. Plus d'une dizaine de corps de personnes tuées ont été publiés, plusieurs autres ont été blessées et des otages ont été retenus par le gang de Canaan. La brutalité des assaillants a été mise en évidence par des vidéos devenues virales, montrant des corps sans vie et révélant la cruauté inimaginable de ceux qui ont orchestré le carnage.

Le pasteur Marco, chef de la manifestation, s'est retrouvé au cœur de la controverse. Suite à l'incident, le commissaire du gouvernement de la Croix-des-Bouquets a émis un mandat d'invitation à son encontre pour éclaircir les circonstances de l'affrontement. Malgré ses blessures, le pasteur Marco a invoqué des raisons de santé pour ne pas comparaître devant les autorités.

La réaction des autorités policières n'a pas tardé. La Police nationale d'Haïti a annoncé l'ouverture d'une enquête afin d'examiner les événements et de déterminer les responsabilités de chacun. Le directeur général par intérim de la police nationale, Frantz Elbé, a souligné que malgré les efforts de la Police nationale pour empêcher l'affrontement, les manifestants ont réussi à contourner les périmètres de sécurité et à atteindre leur destination dans la zone de Canaan.

«La Police avait pris des mesures en établissant des périmètres de sécurité pour empêcher les participants d'atteindre leur destination et avait engagé des pourparlers pour convaincre les organisateurs de ne pas poursuivre cette entreprise afin d'éviter un massacre de la part des bandits qui disposent d'un arsenal de guerre», précise la note.

La PNH informe qu'une enquête judiciaire est déjà en cours à la Direction centrale de la Police Judiciaire (DCPJ) afin que de tels actes irrationnels ne se reproduisent plus.

Une autre réaction émane du Centre d'analyse de recherche en droit humain (CARDH) qui exige que les responsables soient identifiés dans cette triste affaire. Sans exonérer le pasteur, le CARDH estime que les autorités policières, une fois informées de la marche, auraient dû l'empêcher.

Le CARDH en a profité pour déplorer les conditions de fonctionnement de la police. «Avec environ 3 000 policiers pour assurer la sécurité de 12 millions d'habitants, sans hélicoptères, sans technologies de pointe, sans drones appropriés», souligne cet organisme de défense des droits humains.

De plus, le centre souligne que la communauté internationale se contente d'émettre des promesses sans avoir encore pris d'actions concrètes. Pendant ce temps, les problèmes politiques internes semblent prendre le pas sur les besoins pressants de la population.

Face à cette situation préoccupante, le Centre d'analyse et de recherche en droits de l'Homme (CARDH) lance un appel urgent au gouvernement haïtien et à la communauté internationale, soulignant qu'il est impératif de fournir des moyens adéquats à la police nationale et de mobiliser les forces armées pour endiguer la montée en puissance des gangs.

De son côté, la fondation Je Klere appelle à une application rigoureuse de la loi. En effet, la FJKL a rappelé que l'incitation à la violence et à l'armement de la population, notamment par le biais de discours pastoraux, constitue des actes criminels punissables en vertu du Code pénal haïtien. «Trois à quinze ans de prison sont prévus par la loi en la matière», rappelle la FJKL.

 

 

Esdra Jeudy 

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