HAÏTI-CRISE

Pamela Ann White plaide pour le rétablissement de la sécurité en Haïti

L'ancienne ambassadrice américaine en Haïti Pamela Ann White s'est exprimé ce jeudi 29 septembre 2022 sur l'acuité de la crise multisectorielle qui sévit en Haïti lors de l’audition de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants des États-Unis sur Haïti. De l'avis de Pamela Ann White, il est quasiment impossible d’organiser les élections dans le pays à cause de la situation sécuritaire délétère actuelle.

La dégradation de la situation socio-économique et politique du pays requiert l’intervention immédiate de  la communauté internationale notamment de l’Administration Biden dans le but d'apporter des solutions durables à la crise humanitaire haïtienne et de ménager le niveau de violence et d’insécurité. Ce qui consiste à aider le peuple haïtien à redresser, une fois pour toutes, la barque du pays. 

 

D’après la diplomate, Haïti est un État en ruine. Dans son témoignage le jeudi 29 septembre 2022, elle a énuméré les divers problèmes auxquels le pays fait face: pas de gouvernement légitime, le système judiciaire et le Parlement sont dysfonctionnels et la Police nationale d’Haïti complètement faible se trouve dans l'incapacité de traquer les bandes armées qui gouvernent plus de 60 % de Port-au-Prince et ses périphéries. «  Il est temps de jeter les gangs et de prétendre que la diplomatie normale fonctionnera en Haïti», a laissé comprendre la diplomate qui a  servi en Haïti de 1982 à 1985, mais également comme ambassadrice des États-Unis de 2012 à 2015. 

 

«  J'ai vu de nombreux hauts et des bas en Haïti, y compris la réponse extraordinaire à l'horrible tremblement de terre de 2010 lorsque plus de cinquante pour cent des citoyens américains ont envoyé une sorte de don pour aider le peuple haïtien. J'ai vu la corruption et la guerre des gangs et des centaines de pneus en feu. J'ai vu des manifestations dans les rues et des violences contre des civils innocents. Je n'ai jamais rien vu de tel que l'effondrement total de la civilité qui caractérise la situation actuelle en Haïti », a témoigné l'ex-ambassadrice américaine en Haïti, Pamela Ann White, devant la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants des États-Unis. Des représentants de Nou p ap dòmi, RNDDH et POHDH, invités `a intervenir devant la commission, ont tenu à faire savoir que les gangs armés ont une grande emprise sur Haïti et sont de connivence avec les politiques.

 

L'ex-ambassadrice américaine en Haïti dit parier que le Premier ministre Ariel Henry ne serait pas le premier choix de la population haïtienne, si l’on se base sur sa réaction. De même, elle dit estimer que présentement tout le monde a une vision différente de l'arrangement politique qui conviendrait le mieux à Haïti.  « Si nous voulons vraiment laisser le leadership être déterminé par les Haïtiens eux-mêmes, alors demandons en fait au peuple haïtien », a clamé Pamela Ann White 

 

Concurremment, Pamela Ann White a rappelé que les Haïtiens vivent dans des conditions infernales tout en soulignant que tous les services sociaux ont été supprimés il y a des mois dans le pays. Tenant compte de ses déclarations,  Port-au-Prince a le plus grand nombre d'enlèvements au monde. « De plus, il y a des passages à tabac hebdomadaires et des brûlures corporelles. Les enfants des orphelinats sont terrorisés par des balles qui passent au-dessus de leur tête sans se soucier de leur sécurité. La Police nationale d'Haïti (PNH) a moins d'armes, moins de membres et beaucoup moins d'argent pour mener à bien ses opérations que les gangs », a-t-elle ajouté 

 

En effet, tous les acteurs internationaux soutiennent incontestablement qu'une sécurité accrue, la croissance du secteur privé, l'amélioration des services d'éducation et de santé sont toutes nécessaires, du point de vue de la diplomate, ils disent vrai. Cependant, elle aurait souhaité que ces partenaires internationaux admettent que ce qui est nécessaire actuellement n'est pas un plan quinquennal compliqué pour résoudre tous les nombreux défis d'Haïti, mais des démarrages sur le terrain dans l'immédiat.

 

« Pas plus tard que la semaine dernière, l'ONU a promis dix millions de dollars supplémentaires pour un nouveau panier de sécurité que l'ONU gérera. L'USG a promis trois millions. Je ne peux pas déterminer ce qui pourrait éventuellement être fait avec treize millions de dollars qui commencerait à mettre un frein au terrorisme qui est vu quotidiennement en Haïti », a-t-elle martelé ce jeudi 29 septembre devant  la Chambre des représentants des États-Unis.

 

En ce qui a rapport aux actes de banditismes et de violences qui ne cessent d’augmenter dans le pays, l'ex-ambassadrice américaine a évoqué certains cas récents qui ont encore attristé les familles haïtiennes : comme celui du  18 septembre 2022 où une employée très respectée de Digicel a été retrouvée battue à mort dans sa voiture, elle a été victime d'une tentative d'enlèvement ratée et les deux journalistes haïtiens qui  ont été abattus en plein jour. D'autre part, elle a mentionné le meurtre de l’ancien sénateur du département du Sud,  Yvon Buissereth, qui a été abattu puis brûlé vif dans sa voiture en août dernier. Ce n'est qu'après le départ des voyous que la Police nationale est arrivée sur les lieux, a-t-elle déclaré.

 

Ceci dit, pour elle, rétablir le climat sécuritaire délétère du pays est plus qu’important « Avant de pouvoir parler de quoi que ce soit d'autre en Haïti, nous devons aborder la situation sécuritaire et ne vous y trompez pas, ce ne sera pas bon marché. Mon vote est d'abord de sécuriser les rues, les maisons et les moyens de subsistance du peuple haïtien. Puis augmenter l'aide humanitaire. Ensuite, parlez des élections et de nombreuses autres réformes nécessaires. Mais rien ne bougera si nous ne pouvons pas assurer la sécurité. Rien ne bougera sauf la prise de contrôle en gros d'une nation par des voyous», a-t-elle exigé 

 

Selon elle, à  long terme, personne ne va pouvoir résoudre les problèmes d'Haïti sans revitaliser le secteur privé, investir dans les écoles et les hôpitaux et la réforme judiciaire, jusqu’à organiser des élections crédibles dans le pays. Toutefois, elle estime prioritaire à  prendre d’abord des mesures à très court terme avant de coordonner un programme politique à long terme pour Haïti. « Chaque jour qui passe sans une décision ferme sur la manière de soutenir Haïti signifie plus de cadavres, plus d'enfants affamés, moins de chances de tenir des élections et un effondrement complet de la société civile », pense-t-elle.

 

Par ailleurs, elle demande aux autorités internationales de se  soucier des Haïtiens parce qu'ils sont leurs voisins. « Nous devons nous soucier d'Haïti parce que nous sommes des gens compatissants qui tendent la main lorsque nous voyons des gens qui souffrent de la faim, de la négligence et de la violence. Nous devons nous soucier d'Haïti parce que nous ne pouvons pas regarder les membres de gangs terroriser un pays avec lequel nous nous sommes liés d'amitié et que nous avons soutenu pendant des décennies. Les Américains aident les personnes qui en ont désespérément besoin. Les Haïtiens sont désespérément dans le besoin », plaide la diplomate.

 

Vladimir Predvil 

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