Le Conseil de sécurité de l’ONU a finalement voté une résolution visant à remplacer l’actuelle force kenyane, dont la capacité opérationnelle n’a jamais atteint le seuil prévu. Sur le terrain, cela n’a guère modifié les rapports de force, et ce, malgré les actions courageuses de nos forces de sécurité et du bataillon kenyan.
Cette décision du Conseil, obtenue après de longues négociations au sein d’une communauté internationale plus divisée que jamais, soulage bon nombre de compatriotes. Haïti n’est donc plus un conflit oublié. Le cauchemar vécu par les Haïtiens pourrait aisément se propager dans la région : aucun cordon « sanitaire » ne saurait protéger les nations voisines face à une telle épidémie de violence. C’est d’ailleurs ce qu’ont compris les Américains, les Dominicains et une vingtaine de pays d’Amérique latine ayant appuyé ladite résolution.
Toutefois, une inquiétude demeure. En dehors de quelques politiciens qui guettent le vide éventuel du pouvoir — les uns pour se repositionner, les autres pour s’y positionner —, aucune initiative nationale et patriotique ne semble émerger pour préparer l’après-Conseil présidentiel de transition (CPT). Nous devons cesser de nous faire surprendre par les mêmes crises, fruits de nos divisions séculaires et de notre incapacité à nous rassembler autour du bien commun.
La communauté internationale peut épauler, mais elle ne peut pas rêver à notre place. Car si le monde commence à se souvenir d’Haïti, il nous revient, à nous, de nous souvenir de nous-mêmes — et de bâtir le jour où l’on parlera enfin de notre pays comme d’une renaissance, et non plus d’un chaos.
Roody Edmé