Joe Jean Charles journaliste, photographe et animateur du club de lecture au Centre culturel Pyepoudrevient de publier avec toute l’intensité de son émotion et avec la vivacité de sa sensibilité son premier recueil de poèmes « Entre sanglots et larmes ».Animé par l’urgence de dire le silence et par le désir defaire ressortir les frémissements de l’âme du poète, le livre sera bientôt disponible en Haïti et un peu partout à travers le monde. Le National a rencontré le poète. Entretien.
Le National: Pouvez-vous vous présenter pour les lecteurs du journal Le National ?
Joe Jean Charles : Je me nomme Joe Jean Charles. Je suis poète, journaliste et photographe. J’anime un Club de lecture et je suis également chargé de communication et événementiels de la bibliothèque du Centre culturel Pye Poudre.
LN: « Entre Sanglots et Larmes » est-ce votre premier livre ? Et qu’est-ce qui vous a amené vers l’écriture ?
JJC : Oui, c’est mon premier recueil de poèmes. Ce qui m’a amené à l’écriture est l’urgence du dire.
Dire avec toute la flamme de la sensibilité qui m’habite sans pour autant mettre le feu au verbe.
Dire avant qu’il ne soit trop tard
Dire pour conjurer de l’enfer nos soleils décapités
Dire pour empaqueter la vie dans ses vérités propres
LN : Pouvez-vous nous présenter ce recueil ? Et pouvez-vous également permettre à nos lecteurs d’apprécier un extrait ?
JJC : Ce recueil de 118 pages, paru le 27 juin 2022 aux éditions Milot Paris (France) est un ensemble de textes qui se nourrit d’un réalisme cru et des expériences vécues. Il se laisse traverser sur un ton sobre et alerte par des thématiques phares du genre poétique partant de l’angoisse, du rêve, de la douleur, de l’amour, de la rage de vivre, de la mort… C’est à la fois un carnet de voyage introspectif et un chant d’espérance à un monde qui va mal.
« Parfois
La vie nous paraît
Injuste
Triste
Terrible
Cruelle
Méchante
Elle est souvent
Comme des fleurs sauvages
Qui se maquillent de noirceur
Des plastiques de doute jaunis
Avec l’orthographe du sang
Grouillant au bas ventre des villes
Des cimetières de cris humides
Roués dans l’étendue du temps
Des bombes d’amertume
Qui partent à la renverse
Bousculent et avalent nos joies
Comme pour mieux
Écraser nos rêves
Éteindre l’espoir
Et effacer l’avenir
Disloqué dans la masturbation des crises
Injuste
Triste
Terrible
Cruelle
Méchante
Sans cœur
Notre vie est à réinventer
Orphelin de lumière, extrait d’ « Entre sanglots et larmes ».
LN : Qu’est-ce qui vous a incité à écrire ce livre ?
JJC : Les choses qui m’ont incité à faire naître ce recueil de poèmes me sont venues suite à une succession d’observation du monde et de la condition humaine. Ce tableau sombre me pousse à questionner les multiples couleurs découlant du vrai sens de l’existence (de la vie), avec pour seuls complices des mots qui retentissent dans ma tête avant de se métamorphoser en tâches d’encre sous mes doigts. D’où la naissance de la germination d’Entre sanglots et larmes.
LN: Quels sont les auteurs .es. haïtiens.nes et étrangers qui vous ont inspirés ?
JJC :« Entre sanglots et larmes » naît directement des bouleversements et des CRIS du monde. La vision picturale du peintre norvégien Edvard Munch m’a beaucoup influencé dans ma démarche d’écriture. L’idée même d’écrire ce texte m’est inspirée par l’un des plus célèbres tableaux expressionnistes : ‘Le cri’, dont il en existe cinq versions réalisées entre 1893 et 1917. À cette même thématique, s’ajoute aussi l’écrivaine haïtienne Marie-Célie Agnant. Comme un chapelet de prières, je déroule et médite souvent sur cet extrait de texte tiré de son œuvre poétique ‘Et puis parfois quelquefois’, publié en 2009
« nul frémissement
Nulle voix
Nulle main
Seulement la certitude profonde de la colère
Et l’angoisse
Ce froid dans la poitrine
Et puis parfois
Quelquefois
Ce regard infiniment triste
D’où émerge la nostalgie
Brutale
Ce cri
Que jamais ne s’endort’
Bien évidemment, la lecture des œuvres d’autres auteurs a d’une manière ou d’autre influencé mon écriture : Je peux donc citer Anthony Phelps, Gary Klang, et René Dépestre qui pense que la poésie est : ‘le seul état de la vie qui permet de marcher pieds nus sur des kilomètres de braises et de tessons ou de traverser à dos de requins un bras de mer en furie’.
Je prends beaucoup de plaisir à lire des textes de Coriolan Ardouin, Georges Sylvain, Etzer Vilaire, Charles Moravia, Émile Roumer, Jacques Roumain, qui d’ailleurs exprime d’une manière particulière la frustration et la rage… Roussan Camille, le photographe et poète Gérald Boncourt, le diable d’homme Frankétienne, Marie Claire Walker, James Noël, Rodney Saint Éloi, Mackenzy Orcel et plein d’autres.
LN : Pour qui avez-vous écrit ce livre ?
JJC : Ce recueil de poèmes est non-genré et humaniste. Il est dédié à l’humanité entière.
Il est chant d’espérance à tous ceux qui vivent difficilement leur vie dans l’illusion vertigineuse de ce monde brutal, aseptisé, anesthésié.
Au moment où je réponds à vos questions, l’angoisse s’installe en maître au cœur névralgique du questionnement d’actualité mondiale. Hormis ma terre d’origine Haïti, le monde est tout aussi en alerte rouge permanente. De ce fait, j’écris ce texte pour me positionner face au tragique de la vie humaine. Je l’écris pour exhiber tout ce qui me serre à la gorge, au plexus. Je l’écris comme un écho de cris saignants pour tenter de surpasser les saisons sauvages de ce temps de chien qui nous aboie et nous tournoie sans arrêt dans une mer d’angoisses agitée par des vagues d’amertumes, de violences, de doutes et de désespoir. Je l’écris pour panser les blessures de l’âme, face à notre » erre qui s’enterre.
LN: Où est ce qu’on peut trouver l’ouvrage ?
JJC : « Entre sanglots et larmes » est présentement disponible dans certaines Librairies en France, et est également en vente sur le site internet de l’édition Milot Paris : https://livres.editionsmilot.com/produit/entre-sanglots-et-larmes, sur Amazon : https://urlz.fr/iFzc , Rakuten : https://fr.shopping.rakuten.com/offer/buy/8772575172/entre-sanglots-et-larmes-de-joe-jean-charles.html, eBay, etc. Il sera très bientôt disponible en Haïti au niveau de librairies, des bibliothèques et de la presse.
Le National : Un dernier mot
Joe Jean Charles : Aux lecteurs et lectrices, je vous souhaite une bonne lecture. Je reste disponible à toute éventuelle conversation autour du livre.
Merci Le National de m’avoir accordé cet entretien.
Propos recueillis par :
Schultz Laurent Junior