Dimanche 24 août 2024, après vingt ans d'attente l'autel du plus célèbre des Gangan, chanteur et officiels haïtiens est monté dans un haut lieu à la fois culturel, culturel et transculturel en passant de temple catholique à une salle de spectacle cosmopolite animée par les esprits du Vodou haïtien.
Des refrains qui entraînent toute l'assistance dans un élan de chœur. Fla Vodou se pèleren nou ye, se pa charite map mande; Vire wonn, parmi d'autres accords participaient dans cette célébration de musique sacrée et populaire haïtienne, tout en transformant Le Balcon en un péristyle Vodou.
Durant cette grande fête du Vodou au Canada, on retiendra que le personnage sacré, la grande dame Erzulie Dantor, n'a pas bénéficié des mêmes honneurs adressés à Freda, à travers les Ochan du maître des lieux, dans une salle remplie de ces femmes d'origine haïtienne qui incarne visiblement les vertus de cet esprit féminin. Entre Règleman et Pelerinaj, quels sont les Lwa Vodou qui dominent le répertoire de l'artiste ? Et pourquoi ?
Dommage, la durée du spectacle était trop limitée, trop restreinte, ne laissant pas assez de temps au chanteur pour saluer chacun des membres de cette grande famille déportée, exportée, ou pour mieux être protégée.
Durant l'espace-temps des trois heures de spectacle, le samba Érol Josué a remis les pendules du Vodou à Montréal, à l'heure de la mobilisation collective, de la sensibilisation patriotique, et dans une forme de communication mystique aux tons et rythmes de son «Pelerinaj». Le Vodou électrique et magnétique a bel et bien été en marche à cette soirée bien illuminée par des professionnels de la musique et du spectacle, assez bien trempés dans les couleurs tant désirées par Freda, Ogou et tous les autres lwa Ginen du Panthéon.
Diplomatie culturelle, l'ambassade d'Haïti au Canada invitait le public à assister à ce spectacle présenté par le Consulat général d'Haïti à Montréal et Aditi.
Danse et chant Vodou, dialogue entre l'artiste avec le public sur l'essence de la culture et les raisons qui obligent une partie de la population à s'éloigner de sa terre natale, pour s'inscrire dans ce pèlerinage à travers plusieurs pays et villes dans le monde.
Des interprétations qui offrent au public l'occasion de voyager dans les profondeurs de cette culture ancestrale importée, et réinventée en Amérique du Nord.
Du nombre de ses différentes escales musicales à l'étranger, Érol Josué ne manque pas l'occasion de féliciter la contribution des nombreux musiciens et danseurs, des techniciens de son et de lumière qui l'accompagnent dans la fabrication de ses péristyles téléportés. Marcus de la Côte d'Ivoire, Smith qui a fréquenté, à travers «Kote moun yo,mwen pa wè moun yo ?», et Peterson ont été salués, en dehors de Marc Saint-Victor de Aditi. Ces derniers, originaires de plusieurs pays, ne sont pas étrangers aux lois de la musique sacrée haïtienne. Ce qui confirme que le Vodou est universel.
Dans ses heures de gloire, comme à cette soirée mémorable, tout en reconnaissant que les années qui passent et qu'il ne dispose pas de la même énergie qu'il avait dix ans plus tôt, le hougan ne néglige pourtant rien au passage. Ses mouchoirs et parfums sacrés, ses costumes sacrés Lwa et ses mouvements partagés entre la danse et la transe confirment toute sa maturité musicale et mystique, jusqu'à confier son corps et sa voix aux esprits Vodou.
De nombreuses personnalités des milieux diplomatiques, médiatiques, culturels artistiques entre autres étaient présents. À la fin du spectacle, les responsables ont pris le soin de remettre des plaques, l'ancienne cheffe de poste madame Guerline Frédéric a été salué pour son implication à l'origine de cette activité, en présence de la chargée d'affaires ai de l'ambassade d'Haïti au Canada, madame Marie Françoise Suzan. Le nouveau chef de poste, monsieur Anes Lubin, a reçu également le mérite d'avoir contribué dans la réalisation de ce spectacle de qualité, accessible aux membres de la diaspora haïtienne évoluant au Canada.
D'une pierre à plusieurs coups, Érol et ses musiciens ont conquis le public dans un mélange de musique traditionnelle soigneusement greffée sur des notes au piano, et d'autres instruments à corde qui assurent l'ordre suprême imposé par les Lwa dans la musique sacrée. La diplomatie culturelle se renouvelle et se réinvente par une offre culturelle de qualité apportée par le hougan et directeur du Bureau national d'Ethnologie, de passage à Montréal, entre partage et «Pelerinaj».
De Toronto à Gatineau, en passant par Sherbrooke et d'autres grandes villes proches et éloignées du Québec, les racines culturelles d'Haïti se renouaient en cette occasion. Qui a dit que le Vodou, à travers la puissance sacrée du Tambour, avait le pouvoir de convoquer les Haïtiens les plus authentiques et fiers de leurs origines, de leurs ancêtres et de leur raison d'être sur terre ?
Dominique Domerçant
