Dans une belle collection de portraits présentés il y a quelques années par l’artiste Faimy Abdullah Hakime, la spiritualité au féminin pictural s’exposait à l’horizon aux quatre saisons.
Des images de Marie, de la Notre-Dame de Czestochowa, de la Notre-Dame d’Altagrâce, de la Notre-Dame du Perpétuel Secours parmi les autres figures comme la Notre Dame des Douleurs avec des larmes aux yeux, la Notre-Dame de la Délivrance, La vierge du Brésil ou la Madone d’Afrique vibrait aux multiples tons chromatiques et symboliques. Ainsi, on assistait l’aventure picturale au féminin sacré, à travers l’exposition dénommée ‘’Hommage à la vierge Marie” ?
Des pierres, des cristaux ornent les portraits de Marie, de Jésus, et des Rois Mages. La lumière y ajoute un éclat particulier, laissant l’impression que les auréoles s’illuminent et brillent. L’artiste a trouvé une méthode originale pour faire parler son art, après avoir consacré neuf ans de sa vie spirituelle à la recherche des représentations et vocables de la vierge Marie, elle a mis 3 ans pour préparer 77 tableaux.
Dans l’ancienne adresse de la galerie Festival Arts Haïti, à Pétion-Ville, on se souvient encore comme si c'était hier, que la plasticienne Faimy Hakime a exposé ses toiles aux couleurs sacrées du 21 novembre au 15 décembre 2014. Bientôt onze ans plus tard. C'est le temps de faire un retour sur l’histoire passionnante de cette femme artiste peintre et diplomate, dont les œuvres célèbrent les portraits des personnages religieux et sacrés.
Dans une publication encore disponible sur le blog libre de lire, on peut explorer le récit suivant : “ « C’est un hommage à Marie, un hommage à la Vierge, à ce ciel qu’elle nous apporte et que nous avons tous dans notre cœur et qu’il nous faut chercher pour le mériter »”.
Dans ses témoignages rapportés dans le texte : “Hakime Faimy nous confie ces mots avec dans la voix une certaine énergie qui dévoile la relation sacrée qui existe entre elle et ses œuvres. L’exposition rassemble plus d’une soixantaine de pièces, toutes, avec pour point focal, Marie, la Vierge, directement ou indirectement. Tout revient à Marie. Cependant, nous affirme l’artiste, il ne s’agit pas d’une seule représentation de la Vierge, mais d’un ensemble de représentations provenant de cultures différentes.”.
Démarche figurative, les peintures de Faimy sont extrêmement expressives et ne sont pas que des couleurs et donnent l’impression que les personnages sortent du cadre.
Disposant plusieurs cordes à son arc, et témoin de plusieurs générations, elle continue de servir son pays par ses talents dans la peinture et la transmission de ses savoirs accumulés tout au long de sa trajectoire. C'est une artiste qui construit des passerelles entre les générations, et s'amuse à créer des œuvres référentielles dans l’imaginaire collectif et la représentation de la foi invisible.
Dans son riche parcours artistique transversal, elle souligne qu’elle a participé à différentes expositions avec plusieurs grands peintres comme : Cédor, Hermann, Levoy Exil entre autres, dont une exposition organisée à la maison du Brésil sur requête de l’Ambassadeur et une autre à la MINUSTAH.
Dans un passé récent, s’inscrivent parallèlement des souvenirs mémorables autour de cette artiste, qui figure comme l’une des premières mannequins de la mode en Haïti. Elle raconte avoir étudié pendant ses heures libres le mannequinat, qui a contribué au financement de ses études. Elle se souvient avoir participé à plusieurs défilés de mode tant à l’étranger qu’en Haïti. Plus proche de nous, elle a aussi travaillé avec d’autres designers à la promotion de “Haïti Fashion Week.” Sa contribution appréciée par ses pairs lui a valu en 2012 une plaque d’honneur.
De 1994 à nos jours elle se consacre à l’éducation et la formation des jeunes sur leurs droits, leurs devoirs et savoir-vivre dans leur communauté respective. Depuis 1998 elle enseigne le protocole dans les universités, initie les jeunes universitaires dans le leadership au sein des regroupements socioprofessionnels, les associations et les organisations.
Dans l'univers de cette femme qui a vu le jour un dimanche 24 mai, jour de la Pentecôte il y a plusieurs décennies, plusieurs faits marquants se confirment comme des points de non retour, ou des detours entre les drames et les renaissance. Elle est issue d’ ne famille de treize enfants partageant des origines multiples, cubaine, indienne, libanaise et haïtienne. Elle a grandi entourée de ses frères et sœurs, tout en priorisant les valeurs familiales sacrées, entre les huit sœurs et cinq frères qui ont émigré un peu partout à travers le monde, dont trois d’entre eux ont rejoint la maison céleste.
Dès l’àge de deux ans, Faimy Hakime a commencé ses études chez les Soeur de la Sagesses ou elle apprit dès le jeune âge à prier avec soeur Etienne qui, paralysée depuis l’âge de 22 ans passait ses journées à prier et apprendre aux petits l’amour et la dévotion à la maman Fatima. Fuyant les persécutions politiques elle quitte Haïti à l’âge de quatorze ans à cause de ses liens familiaux, rappelant que sa mère “Manmie Lala, à la fois artiste, femme de l’Art et politicienne, subissait certainement des menaces pour son appartenance politique, et en tant que nièce d’Yvonne Hakime-Rimpel, première femme journaliste et victime du régime de Duvalier, et le comble filleule du Président Paul Eugène Magloire.
D'autres faits marquants, l’artiste peintre Faymie Abdullah Hakime allait poursuivre ses études aux Etats-Unis jusqu’à l’université, pour étudier la gestion et les langues, en dehors des deux ans de formation à un cours de philosophie existentialisme, confie-t-elle, tout en informant detenir parallelement une maîtrise en sciences diplomatique et un baccalauréat en arts libres.
De retour en Haïti, elle poursuit ses études à la faculté de droit de Port-au-Prince durant trois ans, dans les sciences juridiques, peut-on lire dans sa biographie. En 1980, elle figure au sein du groupe d'écrivains et de journalistes actifs dans l’ouverture de la Télévision nationale d'Haïti (TNH). Elle devient par la suite Miss Haïti, en dehors de sa participation à différents concours de beauté en République Dominicaine où elle a été couronnée Miss Globe Tourisme, puis Miss popularité et une deuxième fois Miss Haïti, entre 1980 et 1982.
De 1983 à 1998, elle intégra l’Administration Publique et prêta ses services à différents ministères jusqu’à celui du tourisme. De 1990 à 1991, elle participe au gouvernement Ertha Pascal Trouillot qui aboutit aux premières élections libres en Haïti.
Des séquelles de la maladie à la mort de sa mère aux thérapies, c'est dans la peinture qu'elle allait trouver refuge. Un premier portrait au fusain de style naïf. Elle confie qu'elle n'était pas satisfaite de ce premier pas. En quête de conseils, elle se réfère à un ami-avocat, maître Guy Joseph, qui la pousse et l'encourage dans l'exploration de cette passion. Encore préoccupée, elle se questionne “Comment je vais faire? Vais-je tout gâcher ?”. Mais elle reprit et se lança. Ainsi débute son aventure avec la peinture.
Des couleurs, des ornements, des cristaux… “Tout s’invite et se dérobe sous les yeux du spectateur. Des pièces vivantes, qui touchent et nous plongent dans une douce méditation.", rapporte ce texte illustrant l'exposition en question. Faimy Hakime se confirme comme une artiste peintre qui signe à la fois la créativité et la sacralité des œuvres dans une forme d'engagement manifeste par et pour la foi.
Dominique Domerçant
