Petite fleur de lune

Première partie

J’avais choisi de vivre heureuse. Comme au temps des fleurs. Ce temps disparu de nos journaux. Terrifié par la conquête des villes avec des bandits nouvellement en vogue. De grande ravine de cité de Dieu, c’est mystique tout ça, rien de plus.

 J'ai renoncé aux longues soirées des festins. Aux vernissages dans les galeries d'art. Aux dimanches ensoleillés sur les places publiques et aux bains de mer luxurieuse pour assister à des tueries. Des meurtres ensanglantés. Des délits commis avec des calibres de dernier cri. Des pleurs, des vengeances, des pertes et encore des morts. J’ai alors compris que le monde va mal. Que les deuils sont durs à suivre et que la vengeance réapparaîtra après chaque meurtre et ainsi de suite. J’aimais ma vie comme une fillette qui venait de recevoir une poupée aux cheveux soyeux et lisses. Une robe de Madonna et des bottes en cuir. Malade. J'avais besoin de temps pour allonger chaque cil et noircir chacun de mes sourcils pour que l'on me regarde avec des yeux d'envies.  Plus maintenant. Je ne ressens rien. Regarde et essaie de voir si j'existe.  Si je vis. À travers de mes enfants. J’apprends à respirer. À bouger pour  vivifier leur existence, mais intérieurement,  je suis morte, mes funérailles ont été annulées par faute de réclamation de corps. Comme une chienne réincarnée. J’aboie pour faire croire que ma seconde vie vienne de débuter et je recommence à veiller sur mes enfants. Il y a onze ans, je prophétisais sur la mort d’un chef d’État, personne ne m'a cru, à l'instar, mon fils aîné. Est toujours au courant de mes dernières conversations avec les dieux de panthéon  du vodou haïtien  au cours de mes songes. Il a su que je ne divaguais pas, que les vérités purement mystiques ne proviennent que du plus profond des songes des bien-aimés de la nature. Le soir, je ne vois plus les lucioles, ils sont partis en quête de chaleur, de bonheur fraichement livide, loin de ce pays maudit, mangeur de mensonge. Je crains pour mon fils Rashid qui veut être un artiste pourri, comme Picasso, Faulkner, Mike Davis, celui qui rêve de se mettre aux côtés des autres pourris de renom. Déjà la mort et la vie je n’en rien à régler d’eux, tout qui m’importe c’est mon bonheur, passe au revers de l’oubli.

La rage au ventre. Arthur  était un menteur de grande audace. Je l’aimais malgré la nuit. Je pensais que si mon homme était quelqu’un gentil, un être  humain  parmi les êtres. Ma vie prendrait une autre direction scellée. Parfaite. Sans les ornements aigris du voisinage qui contrôle chaque erreur. Chaque changement d'humeur et interprète tous les faits et gestes selon leur niveau d'éducation religieuse ou selon les commentaires des émissions radiodiffusées qui indiquent les modes conventionnelles à adopter. Des cons à la noix qui répètent à tue-tête des mots écrits par les partisans du pouvoir, chaque syllabe payée en liquide et un espion qui s'assure que tout est répété selon les instructions données.  Arthur et moi.  Nous  étions rencontrés un dimanche, il était peu bavard et m'étudiait des cheveux aux orteils. Un pauvre menteur, qui voulait une femme pour refaire sa lamentable vie, bref, un idiot qui m'a convaincu en quelques heures. Il parlait rarement et cela m'énervait. Une fois marié, il passait ses journées à lire les journaux et commentait les actualités politiques en le comparant à ceux du siècle dernier. Il mangeait silencieusement. Un silence pesant qui surplombait mes pensées, me dominait et m'enivrait. Je le détestais au fur et à mesure qu'il me méprisait. Je n'arrivais jamais à supporter ses paupières baissées sur les feuilles des journaux qu'ils ne déposent que pour prendre son bain et boire un coup. Il ne faisait pas l'amour, nous dormions à une distanciation respective l'un de l'autre. Quand il a envie de moi, il me gratte et je lui ouvre les jambes. Il me pénétrait, s'essouffle et prend son plaisir. Parfois, il m'embrassait avec avidité, me mord et criait au moment du jet de spermes alcoolisés sur le lit. Il ne veut pas d'autres enfants, c'est moi qui travaillais, le congé maternel pourrait nous coûterait cher. Avec ce paresseux. Je ne risquerai pas ma vie en mettant en jeu celle de mes enfants. En cherchant du travail n'importe où. J’ai rencontré quelqu’un qui m'a offert de l’argent en échange d'une nuit de plaisir loin de sa présence, il ne sait rien dit. Il est contre la violence physique, mais accepte l'irrespect des autres envers moi. Un haut fonctionnaire qui pourrait me dénicher une bonne place dans le secteur de l'administration publique, mais préfère se jouer de moi en prétextant qu'il me donnera le double du salaire minimum si j'accepte ses sales avances. Les hommes,  aussi insatiables qu'ils peuvent être. Utilisent souvent des manières minutieusement étudiées et parfois complotées pour ne pas commettre d'erreurs.

 

Godson Moulite ( à suivre)

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