Sous la coordination du MENFP, plus de 300 écoles accueillant plus de 90 000 élèves bénéficient du programme de cantine scolaire, une initiative pour favoriser le maintien des enfants à l'école. Depuis trois ans, la BID soutien les actions du gouvernement haïtien dans la mise en œuvre du Plan Décennal d’Éducation et de Formation (PDEF). L’objectif : améliorer les conditions d’apprentissage des élèves dans les écoles fondamentales publiques et non-publiques afin de renforcent la gouvernance, la qualité de l’enseignement, l’inclusion et l’accès des élèves au système éducatif.
Chaque jour, à la même heure, un moment très attendu rassemble les élèves de l’école nationale des filles à Fort-Liberté, département du Nord-Est. Il est midi, le repas du jour est prêt à être servi. Dans une ambiance de bonne camaraderie, les élèves, réunies dans leur salle de classe reçoivent chacune un plat chaud composé de céréale et de légumes. Une initiative qui change le quotidien de centaines d’élèves surtout pour Daetana, élève de 9e année, qui ne cache pas sa joie de partager ce repas avec ses camarades.
« Chaque jour, on a un menu différent. La cantine m’aide beaucoup. ll arrive que, le soir, ma mère ne cuisine pas, alors comme j’ai déjà mangé à l’école, je peux me consacrer tranquillement à faire mes devoirs et mes révisions. » confie-t-elle.
Pour certains élèves, c’est peut-être le seul vrai repas de la journée. Ici, la majorité des enfants viennent de familles à faibles revenus, fortement touchées par la crise économique et sécuritaire. Pour Pierre Manoucheka, enseignante en 6e année depuis 2017, la cantine scolaire ne se résume pas à offrir un repas aux enfants, elle motive les élèves à venir en classe et les aide mieux à apprendre.
« La cantine a démarré dès la rentrée. Avant, on leur servait aussi un petit déjeuner, ça aidait les élèves à mieux se concentrer avant le repas de midi.
Le matin, la première chose qu’elles font, c’est regarder ce qui se prépare dans la cuisine.
Quand elles voient les fourneaux allumés, elles sont rassurées. »
L’alimentation scolaire n’est pas seulement un moyen pour lutter contre la déscolarisation. C’est aussi une priorité stratégique pour le gouvernement, car elle participe aussi au renforcement de l’économie locale. En effet, plus de 70 % des produits alimentaires sont fournis par un réseau de plus 170 agriculteurs locaux regroupé en coopératives du Grand Nord d’Haïti. Avec la commercialisation de ces produits agricole, les autorités locales cherchent également à renforcer les organisations de professionnelles agricoles appelées OPAs. Cet accompagnement comprend la fourniture d’outils et d’équipements agricoles pour améliorer leur productivité et leur condition de travail. Le programme de la cantine scolaire est implémenté par des partenaires d’exécution qui accompagnent le gouvernement dans l’approvisionnement, suivi et contrôle de la qualité des repas qui sont servis chaque jour.
« On travaille avec les petits producteurs pour qu’ils puissent mieux produire et proposer des aliments de qualité. Ils fournissent les denrées par l’intermédiaire des OPA qui sont livrées directement aux écoles directement aux écoles pour les cantines.
C’est une belle façon de faire tourner l’économie locale tout en nourrissant les enfants. » explique Gnagna NDICUPE, cheffe sous-bureau du programme alimentaire mondiale (PAM).
En effet les repas sont préparés avec des produits du terroir afin de garantir une alimentation équilibrée qui répond au besoin nutritionnels et énergétiques des élèves. Le menu est basé sur les habitudes alimentaires locales, avec des produits comme le riz, le maïs, le sorgho, les lentilles, les pois, l’huile et le sel iodé nécessaire pour le développement et la concentration des enfants. En reliant les secteurs de l’éducation et l’agriculture, le MENFP et la BID soutiennent également toute la chaîne d’approvisionnement qui mobilise de nombreux acteurs tels que des producteurs, vanneurs, transporteurs, ce qui génère des emplois temporaires et renforcent les revenus des familles rurales. Il s’agit des dizaines d’hommes et de femmes qui participent à la transformation et la distribution des produits qui de façon régulière sont acheminés vers les écoles soutenues par le programme. Evens SERAFIN, Coordonnateur national de la cantine scolaire pour l’organisation Amente, qui appuie la gestion logistique du réseau des producteurs agricoles OPA/MOPA à Fort liberte.
« Tous les produits qui arrivent ici passe par la phase contrôle et qualité. On vérifie le taux d’humidité ou si le produit arrive à maturité pour la consommation. Ensuite arrive la phase du triage, et vannage avant la mise en sac pour la pesée afin de s’assurer que la quantité envoyée dans les écoles est respecté. »
Le Plan Décennal d’Education et de Formation (PDEF) est finance par la BID avec le soutien de. deux autres partenaires, Education Above All (EAA) et le Partenarial Mondial de l’éducation (GPE). Une délégation du secteur éducation de la BID en mission en Haïti, a accompagné ses deux partenaires lors d’une tournée de plusieurs établissements scolaires. Les 23 et 27 octobre, les délégations ont visité à Fort-Liberté, l’école nationale Dumas et l’école nationales des Filles, ainsi que l’école nationale de Grand Bassin, dans la commune de Grand Bassin.
« Je suis vraiment impressionné de voir comment la cantine scolaire aide à dynamiser l’économie locale et l’implication des parents dans ses activités. La cantine leur donne une belle occasion de s’engager davantage dans l’éducation de leurs enfants. Et puis, voir le sourire des élèves au moment du repas, c’est quelque chose de touchant, ça montre à quel point cette initiative fait du bien. » se félicite Mohammed Yassin, représentant du Partenariat Mondial de l’Education.
S’il est vrai qu’un repas complet chaque jour change tout. Mais ce n’est pas la seule recette pour favoriser la réussite scolaire. Pour promouvoir une éducation inclusive, équitable et de qualité pour tous les enfants d’Haïti, le ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle à travers son unité de coordination de projets UCP-MENFP, chargée de l’exécution des projets soutenus par la BID dans le Grand Nord. Malgré un contexte difficile, le MENFP continue d’avancer dans ses réformes visant à améliorer la gestion du système éducatif et la qualité de l’enseignement. Plusieurs actions sont en cours: la révision complète des programmes préscolaires et primaires cycles 1 et 2 qui seront testés dans certaines écoles à partir de l’année scolaire 2026-2027 ; la formation de plus de 700 professeurs en gestion scolaire et sur les pratiques de résilience environnementales ; la production des annuaires statistiques et des cartographies du système éducatif national ; le renforcement du système d’informations et gestion de l’éducation (SIGE) ; enfin la mise en place d’évaluations nationales des apprentissages qui permettront aux enseignant d’ajuster leur cours pour aider les élèves à progresser notamment en lecture, écriture et mathématiques.
« Tout ce travail vise à améliorer la qualité de l’éducation et nous remercions tous les partenaires qui soutiennent les écoles haïtiennes, que ce soit pour la cantine scolaire, les manuels ou la formation des enseignants.
Pour mieux coordonner ces efforts, l’ONAPE veille à ce que chaque partenaire réponde à un besoin précis, c’est ce qui fait la force et le succès de ce partenariat pour l’éducation en Haïti » se félicite Hervé Boursiquot, le directeur Général de l’office national de partenariat en éducation (ONAPE) .
Au terme de cette visite guidée dans les écoles, Le MENFP et la BID représentés respectivement par le ministre Antoine Augustin et Corinne Cathala ont pris part le 27 octobre au Cap-Haitien à une réunion de niveau autour du Plan Décennal d’Éducation et de Formation (PDEF) appuyé à travers de divers projets financés par la BID depuis 2022. Au cours de cette rencontre, les deux institutions ont renouvelé leur engagement à unir leurs efforts afin de poursuivre le développement des programmes de coopération en faveur du secteur éducatif haïtien.
Gaby SAGET
Pigiste
gaby.saget@gmail.com
