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Chers concitoyens et amis de partout,
Dear compatriots and friends everywhere,
Frè m, sè m ak zanmi m toupatou,
Cette année, nous commémorons le 219ème anniversaire d'un des événements les plus funestes et les plus marquants de l'histoire de notre pays. À compter du 17 octobre, jour où le père fondateur de la nation haïtienne fut lâchement assassiné, on peut dire que cette nation a tourné le dos à son glorieux destin pour devenir une brebis égarée se laissant diriger par des partenaires dont la bienveillance laisse à désirer. Il est vrai qu'on ne peut pas modifier l'histoire, mais quand on se penche sur les circonstances de l'assassinat de Jean-Jacques Dessalines, on ne peut pas s'empêcher d'imaginer la meilleure voie que cette nation, notre nation, aurait choisie. Le 17 octobre 1806, la liberté universelle perdit un de ses alliés les plus authentiques.
En effet, chaque année, nous nous lamentons amèrement sur le sort de notre pays tandis que le mépris du reste du monde ne fait que s'accroître. L'empereur Jean-Jacques Dessalines avait un rêve auquel il tenait fermement . Ce rêve de liberté qui visait aussi le bien-être de tous les citoyens de sa nouvelle nation, avait fait de lui un homme à abattre. Plusieurs de ses compagnons d'armes qui ne supportaient pas l'idée de voir leurs privilèges s'effriter, devinrent ses pires ennemis. Ceux qui mirent fin si lâchement et si brutalement aux jours du père de notre nation le 17 octobre 1806, avaient aussi un rêve. Aujourd'hui, 219 ans plus tard, le cauchemar de notre nation se poursuit. Nombreux sont les héros se font encore assassiner à travers le monde en défendant la cause d'une majorité démunie.
Je ne peux pas m'empêcher de constater que le 17 octobre de chaque année est désigné comme la Journée du Refus de la Misère. Cette initiative clairement socialiste est digne d'être associée à l'héritage de l'homme qui donna sa vie pour la cause des droits humains alors que ce concept n'avait pas encore été banalisé.
Parler de la disparition de Jean-Jacques Dessalines seulement deux ans après que ce valeureux général eut conduit une armée d'esclaves à la victoire c'est évoquer une page de notre histoire qui donne lieu à tant de douleur et tant de regrets.
En effet, pour avoir été lâchement assassiné par certains de ses propres frères d'armes avant même de pouvoir établir les bases de sa toute nouvelle nation, Jean-Jacques Dessalines fut victime d'une double injustice. Il convient peut-être mieux de dire que notre nation est la grande victime car quand l'Empereur Jacques 1er disparut, sa vision aussi disparut. Les décisions qui furent prises après cet assassinat, contrastaient de manière flagrante avec la philosophie du père fondateur de la nation haïtienne. Cette philosophie préconisait le bien-être inconditionnel des héros inconnus qui avaient contribué, grâce à leurs sacrifices, à l'unique victorieuse révolte d'esclaves de tous les temps. Cette vision coûta la vie à Jean-Jacques Dessalines.
L'homme dont nous célébrons la vie aujourd'hui n'est pas uniquement un héros haïtien. C'est un géant aux dimensions planétaires. C'est un génie militaire et un ardent défenseur des droits humains avant même que ce concept ne fût popularisé et vandalisé. Il y a des héros qui sont vénérés partout au monde pour leur bravoure et pour leurs accomplissements brillamment racontés dans leurs moindres détails. Mais il s'agit surtout d'envahisseurs et de conquérants. Ils sont honorés pour avoir subjugué leurs adversaires, et conquis leurs territoires. Dessalines conquit la liberté. Et pour l'avoir vigoureusement défendue envers et contre tous, il fut assassiné.
Aujourd'hui, la nation de Jean-Jacques Dessalines semble sombrer inévitablement dans le chaos et la destruction. Notre pays qui, au début de son existence, était une destination de rêve pour tous les êtres humains qui voulaient respirer l'air de la liberté, est maintenant au rang des pays auxquels personne ne veut appartenir. L'assassinat du père de notre nation a prouvé que la haine avait remplacé l'amour de la liberté dans le coeur de certains de nos ancêtres. Quand nous cessons d'aimer nos propres compatriotes à cause de leur condition économique ou sociale, nous sommes susceptibles de trahir notre nation. Haïti a été à plusieurs reprises trahie par ses enfants. Ce monde indifférent ou carrément hostile ne nous tendra pas la main. Comme nos ancêtres, nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes. Nous devons transcender nos préjugés et cette peur de la liberté afin de surprendre le monde ... encore une fois.
Lesly Condé