Dans une interview téléphonique accordée au journal Le National, le responsable de l’Éveil du Grand Sud, Charlot Murat, a salué la décision des autorités de suspendre le projet de référendum constitutionnel. Selon lui, cette mesure permettra au pays d’éviter de sombrer davantage dans la crise politique et sociale qu’il traverse depuis plusieurs années.
Pour exprimer sa position de manière officielle, l’organisation a publié une note dans laquelle elle qualifie de « sage décision » le choix des autorités de mettre de côté le projet d’amendement constitutionnel. L’Éveil du Grand Sud considère cette décision comme une reconnaissance implicite de l’illégitimité et de l’inconstitutionnalité du processus enclenché, qui, selon elle, risquait d’enfoncer encore plus le pays dans le désordre institutionnel et la division.
Cependant, tout en saluant cette décision, le mouvement attire l’attention sur la volonté des dirigeants de planifier des élections dans le contexte actuel. « Le Conseil présidentiel de transition arrive pratiquement à sa fin et n’a malheureusement pas respecté sa mission. Il est donc improbable de penser qu’il pourra organiser des élections en si peu de temps », a estimé Charlot Murat.
Pour étayer cette position, le responsable a évoqué les multiples défis auxquels le pays est confronté. Sur le plan sécuritaire, la population vit dans une peur constante, empêchée de vaquer librement à ses occupations. Les déplacements sont risqués, et dans plusieurs zones, il serait impensable d’installer des bureaux de vote sans risquer la vie des électeurs et des agents électoraux.
« Nous avons une famille haïtienne déchirée, dont la priorité aujourd’hui est la sécurité. Ce n’est pas l’Éveil du Grand Sud qui dit que les élections ne sont pas possibles, mais plutôt l’ensemble de la population qui partage cet avis », a-t-il insisté, soulignant que les conditions minimales pour un scrutin crédible et inclusif sont loin d’être réunies.
Face à ce constat, l’Éveil du Grand Sud appelle à un sursaut collectif. L’organisation propose la tenue d’une conférence nationale souveraine, rassemblant toutes les composantes de la société haïtienne autour d’un plan de refondation nationale. Elle estime qu’une telle démarche est indispensable pour sortir durablement du cycle de crises politiques et institutionnelles qui secoue le pays depuis la chute de la dictature des Duvalier.
Dans cette perspective, le mouvement invite les corporations professionnelles et syndicales, les organisations de paysans, de jeunes et de femmes, les associations religieuses, culturelles et intellectuelles, les universités, les artistes, la diaspora et les médias à s’unir autour d’un projet commun. Il lance également un appel aux associations d’avocats, aux mouvements environnementaux et aux membres des sociétés traditionnelles et spirituelles, tels que Souvenance, Soukri, Badjo, Déréal, Breda, Gran Chimen, Anacaona ou Dahomey.
L’Éveil du Grand Sud préconise enfin l’élaboration d’un plan de gouvernabilité sur vingt-cinq ans, axé sur la reconstruction des institutions, la relance économique et la restauration du vivre-ensemble. Ce plan, selon l’organisation, devrait replacer l’être humain au cœur des priorités nationales et redonner espoir à une population fatiguée par des décennies d’instabilité.
Sorah Schamma Joseph