L’Organisation des Citoyens pour une Nouvelle Haïti (OCNH) a tenu ce mercredi 3 décembre, une causerie à l’hôtel Montana autour de l’applicabilité du nouveau Code pénal et du Code de procédure pénale dans le contexte socio-judiciaire actuel du pays. L’événement a réuni des professionnels du droit, des représentants de la société civile afin de débattre des enjeux liés à cette réforme juridique majeure.
À l’occasion de cet initiative, Me Camille Occius, directeur exécutif de l’OCNH, a fait savoir que cette activité visait à analyser les implications de la mise en œuvre d’un texte destiné à remplacer l’ancien Code pénal vieux environ de deux siècles. Selon Me Camille Occius, cette réforme ne peut être appliquée efficacement sans un cadre institutionnel renforcé, une formation adéquate des acteurs judiciaires et un respect strict des principes constitutionnels.
« L’application du nouveau Code pénal doit s’inscrire dans un contexte marqué par l’insécurité, la fragilité des institutions et les violences faites aux femmes et aux filles », a-t-il déclaré.
L’OCNH plaide pour une réforme respectueuse des droits fondamentaux, des normes internationales et de la dignité humaine. L’organisation insiste sur la nécessité d’un dialogue constructif autour de thématiques sensibles telles que la protection des minorités et les garanties judiciaires, afin de formuler des recommandations concrètes pour une mise en œuvre réussie.
Pour sa part, Me Jude Thimogène, membre du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) et représentant de la société civile, a rappelé que cette réforme est autant politique que technique. Il a souligné que l’entrée en vigueur du Code est conditionnée à plusieurs prérequis légaux, notamment la formation massive du personnel judiciaire et l’adoption de lois d’accompagnement par le parlement des conditions qui, à ce jour, ne sont pas remplies.
« Sans consensus politique et sans infrastructures adéquates, cette réforme risque de rester lettre morte », a averti Me Thimogène. Il a également souligné que les articles 1030 à 1032 du Code, qui imposent l’organisation de séminaires de formation dans les mois précédant son application. Or, ces formations n’ont pas encore été mises en œuvre par le ministère de la Justice.
De l’autre côté, le magistrat Jean Frédérick Bénéche a présenté une analyse détaillée du nouveau Code pénal, structuré en six livres couvrant les principes généraux, les types de peines, et les infractions contre les personnes, les biens et l’État. Il a salué l’introduction de nouvelles infractions, l’extension de la compétence pénale au-delà du territoire national, et l’approche humaniste axée sur la réinsertion sociale.
Cependant, il a déploré le retard dans la mise en œuvre du texte, promulgué depuis 2020, en raison de l’absence de mesures préparatoires telles que la formation des acteurs judiciaires ou la création de services de probation.
Selon lui, il est plus qu’urgent de doter le pays d’un nouveau Code pénal et de procédure pénale afin de remplacer l’ancien code pénal haïtien daté depuis environ deux siècles. Le magistrat souligne qu’il ne peut plus attendre voyant la mise en application de ces nouveaux codes.
La réforme pénale haïtienne repose sur une triple dynamique: réécriture, dépénalisation et pénalisation. Elle vise à moderniser la justice, à lutter contre la criminalité contemporaine et à renforcer l’État de droit. Mais pour qu’elle devienne réalité, un engagement fort de l’État et une volonté politique claire demeurent indispensables.
Likenton Joseph
