Le Palais national nous a servi un office oecuménique comme s’il suffisait de convoquer les saints, les loas, les dieux ainsi que leurs plus dignes représentants pour exorciser l’épidémie de petites et grandes maladresses qui a caractérisé les sept années de gestion post-catastrophe du grand séisme de janvier 2010. De cette mal nommée « cérémonie », il n’y a pas de fausse consolation qui tienne puisque nos morts sont encore frais autant que les menaces sur la vie et de l’idée qu’on se fait d’elle restent permanentes.
Le Palais national nous a servi un office oecuménique comme s’il suffisait de convoquer les saints, les loas, les dieux ainsi que leurs plus dignes représentants pour exorciser l’épidémie de petites et grandes maladresses qui a caractérisé les sept années de gestion post-catastrophe du grand séisme de janvier 2010.
De cette mal nommée « cérémonie », il n’y a pas de fausse consolation qui tienne puisque nos morts sont encore frais autant que les menaces sur la vie et de l’idée qu’on se fait d’elle restent permanentes.
Après le constat effroyable des dommages et des pertes, y compris des vies, après le bal des vautours, le peuple haïtien a failli croire à sa propre résilience. Une mythomanie collective instaurée par nos amis, tellement précieux, qu’on n’a pas osé se fâcher avec eux au sujet de la canalisation efficace des montants alloués au relèvement du pays de la catastrophe et de sa reconstruction.
Il va de soi que la partie Action de grâce de la messe, pure gymnastique people montée sur le prétexte de remercier nos bienfaiteurs, restera l’expression suprême d’une mauvaise foi. Ou de la cécité. Toute la solidarité spontanée et responsable de ces enfants du pays, les premiers à se porter au secours de leurs soeurs et frères, n’a compté que pour du beurre. Le Palais national n’a pas pris le temps de regarder, dans le rétroviseur, les sept années d’expérimentation de gros ratés, de la bêtise transnationale et de l’embourbement de tous les efforts de reconstruction.
La mal nommée cérémonie du 12 janvier 2017 dessert la crédibilité et le sérieux de cet acte commémoratif. Déclarer le 12 janvier 2017 « Journée nationale de réflexion et de sensibilisation sur la vulnérabilité d’Haïti face aux risques et désastres », est un signe perceptible, mais tellement faible.
Sauf catastrophe, un nouveau président aura la lourde charge de diriger le pays pendant une période de cinq ans. S’engager, à ce niveau, au développement social et économique du pays nécessite du président à venir une conscience aiguisée des menaces en Haïti et aussi les différents facteurs de vulnérabilité qui sont propres au pays.
À quelques semaines de cet important rendez-vous, nous sommes en droit d’espérer que la réduction de la vulnérabilité sera un préalable aux besoins de mise en oeuvre de projets de développement portés par la nouvelle équipe. Plus qu’un serment politique, ce préalable doit être une lutte consciente et engagée pour réparer des siècles de mauvaise gestion d’un territoire. Comme la conspiration précède logiquement l’acte meurtrier, la vulnérabilité d’Haïti n’est que le résultat d’une construction politique et sociale voulue et pensée.
Chaque pluie de saison est assortie de son jour de congé. L’impact d’un cyclone moyen impose une semaine, au moins, d’arrêt des activités. Un tremblement de terre, et tout est à recommencer, s’il ne provoque pas la fin du monde. Irréversible.
Avec ce catalogue de douleurs, il sera difficile d’attirer les investisseurs, développer nos capacités de production, protéger notre patrimoine historique unique dans la région et garantir une paix sociale durable.
Un signal fort, prémices d’un plan de redressement, est attendu tant il est vrai qu’on ne peut pas se contenter de survivre avec le danger ; au risque de sacrifier les générations futures.
Prier au Palais national, même avec les mystiques combinés de toutes les religions du monde, en présence des gestionnaires de la charité et des grandes multinationales de l’humanitaire, ne sauvera de rien du tout. Ne rendra pas le pays plus sûr.
Il faut sortir du Palais pour aller dans les temples, dans les églises, dans les écoles, dans les marchés publics pour entretenir la mémoire de nos morts et de leurs bourreaux !
Jean Euphèle Milcé