André de Sponteville définit la pornographie est la sexualité qui est donnée en spectacle. Donc, sur une place publique ou dans une chambre où une caméra est installé intentionnellement et transmettant des images érotiques sur un écran pour le regard public , un homme ou une femme afficherait un comportement délictuel, s'ils s'avisent à être les auteurs de cette exhibition . Tandis qu'ils seront victimes d'intrusion dans leur intimité, s'ils sont épiés à leur insu et contre leur volonté par des individus dans leur maison. Et dans ce cas il aurait lieu de distinguer la pudeur de la personne qui commet l'acte sexuel dans la jouissance de ses droits et qui est victime du voyeurisme, et celle des voyeurs qui sont des violateurs de ces droits susceptibles de sanctions judiciaires. Car, la sexualité, qu'elle soit manifeste dans une forme acceptée par la morale et l'opinion publiques ou dans cette autre forme que Sigmund Freud ne considère pas comme essentiellement une perversion, est l'une des facteurs pulsionnels du développement psychosocial et de l'épanouissement de l'être humain. Et toute attitude jugeant et condamnant la sexualité qui se pratique dans la sphère de l'intimité ne peut avoir ses références que dans l'économie morale qui est l'ensemble des règles qui censurent les comportements qui n'ont un sens morale que par rapport aux représentations sociales d'une société à une époque donnée. Willherm Rich a écrit un ouvrage " La révolution sexuelle" qui montre les effets pervers de l'économie morale qui avait pendant longtemps condamné des désirs et des actes renvoyant à un détournement des fonctions des organes sexuels et de leur usage pour la satisfaction des besoins libidinaux. Une argumentation qui venait appuyer les théories de Freud sur la sexualité humaine.
Terroriser les désirs sexuels de l'homme ou de la femme qui ne commettent pas de dommages et des préjudices contre la personne humaine et morale d'un autre individu est dans l'ordre des supplices que Michel Foucault dénonce dans sa théorie sur les systèmes carcéraux en France et des mécanismes de l'exercice d'un pouvoir personnel ou institutionnalisé sur l'individu par le contrôle de son corps et spécialement de sa sexualité. Si la société doit dicter les comportements sexuels des individus, cela se fait toujours dans les limites de la loi qui protège l'intégrité physique et morale des citoyens contre toutes les types d'agression dont ils peuvent être victimes ou menacés. Aussi, le viol, le harcèlement ne peuvent et ne sont pas des fantasmes érotiques exprimant des refoulements de la phobie d'être victime du viol ou de vouloir le commettre, ni des fictions qui seraient symptomatiques d'une forme de pathologie collective ou d'une fixation en liaison a un besoin obsessionnel de créer un ennemi qui n'existe. Le viol est un acte concret qui se commet par un individu et qui se produit sur un autre individu. Il implique l'usage de la violence morale ou physique face au non consentement de celui ou de celle qui en est la victime réelle. Pour comprendre le viol fictif ou fantasmé il importe de nommer la ou les victimes qui ne se présentent jamais dans les commissariats et les tribunaux et d'analyser les narratifs du discours accusateur. Ce qui contribue à banaliser une valeur qui est le respect de l'intégrité du corps de la femme ou de l'homme.
L'une des séquelle de l'esclavage qui a été un phénomène de viol collectif et individuel sur l'imaginaire et le corps de l'africain est le refoulement permanent de cette phobie sexuelle. C'est pourquoi à l'instar du blanc qui l'exprimait par un sentiment de racisme, le noir a eu une tendance à voir un violeur dans le noir pendant les périodes coloniales, et post coloniales dans les sociétés où se pratiquait l'esclavage ou les sociétés qui ont été des métropoles esclavagistes et qui sont devenues des sociétés d'accueil pour les migrants africains. C'est un masque blanc porté par un noir souffrant de phobie ou le portrait de l'ex-colonisé qui n'ont pas été exposés à des pratiques de thérapie collective, si nous osons caricaturer Frantz Fanon et Albert Memmi. Si on analyse d'un point de vue psychologique le film de l'acteur noir américain Samuel Louis Jackson "Le droit de tuer", le film dans lequel joue l'acteur Denzel Washington "Malcom X", on en déduira que le blanc avait un droit injuste de violer impunément dans une société de ségrégation raciale, tandis que le noir pouvait être condamné même pour un soupçon ou une accusation haineuse que l'opinion blanche aurait transformé en fait criminel susceptible des sanctions pénal d'un droit américain raciste avant les amendements qui ont mis fin aux lois racistes. Par ailleurs, il y a une tendance chez des acteurs féministes et des acteurs politiques à instrumentaliser le viol contre des adversaires, car ils savent l'effet que cela peut produire sur l'image et la crédibilité de la cible, mais aussi sur les affects de la population féminine qui n'est pas protégée dans ce sens, et encore moins éduquée pour condamner un comportement masculin et/ou féminin irrespectueux des droits de la personne humaine.
L'illustration de l'exercice du pouvoir par le contrôle et la manipulation des représentations sur le corps peut être donné par un chapitre du livre de Frantz Fanon "Sociologie d'une révolution" intitulé "L'Algérie se dévoile". Le psychaliste explique en effet comment le port du voile de la femme algérienne à été utilisé comme argument pour mystifier les femmes algériennes dans leurs rapports avec leurs congénères masculins. Et cela dans une perspective pour dénaturer et fragiliser les relations homme-femme dans un contexte de contestation contre la colonisation belge et française dans certains pays africains. Leur proposant une image d'émancipation de la femme européenne, les colonisateurs ont fait croire aux algériennes qu'elles étaient dominées et exploitées dans une culture fondé sur le patriarcat et le pouvoir masculin.
Tout cet argumentaire est important pour faire comprendre que celui ou celle qui se masturbe dans sa chambre ou sa douche n'est pas une personne qui correspondent à la définition du violeur. Il s'agit d'un être ayant le droit de s'approprier de son corps, de vivre ses désirs, et qui pourrait satisfaire dans la communion érotique une autre personne qu'il est libre d'aimer, de désirer et de satisfaire dans l'expression des pulsions auxquelles la société à donné une forme de socialité que l'on connait sous les notions de amour, flirt, jeu de séduction et de charme érotiques. Mais, cela permet aussi de comprendre le sens de l'intrusion par les mécanismes nationaux et intra sociétaux et internationaux et extra-sociétaux, qui se fait dans la sphère de l'intimité de l'individu, quand d'autres individus se donnent un droit injustifié d'épier la sexualité de celui-ci et d'opiner sur ce qui ne leur regarde pas, et qui justifie que les droits de la personne et du citoyen est sous la menace permanente de violations qui doivent être sanctionnées par la loi. Nul n'est condamnable d'aimer et de se vouloir un peu de bien-être mental et psychologique par la satisfaction de sa sexuelle dans un cadre et des limites qui respectent la liberté d'autrui. Sinon, que dirait cette morale hypocrite qui juge et condamne des actes naturels et acceptables de la vie privée des citoyens, et qui sont vendus aux prix du marché capitaliste mondialisé par le monde hollywoodien des Etats-Unis, et des magasins de sex toys aux vitrines décoratives, des panneaux de Pin up girl et de Pin up boy prouvant la réification et l'aliénation du corps de l'être humain par l'argent dans les pays occidentaux qui donnent le ton aux sociétés du Tiers-monde? La mauvaise foi ne peut pas et ne pourra jamais être de l'ordre de nos démocraties.
Cheriscler Evens
Professeur et journaliste
