Education: et si on parlait des gangs dans les écoles en Haïti ?

Dans quel sens on pourrait  encourager dans le système éducatif haïtien, des initiatives qui prennent en compte un certain nombre de problèmes réels qui affectent la vie, l’environnement et l’avenir des écoliers et leurs familles, des professeurs et l’ensemble des membres du système éducatif, des activités économiques et de la survie de toute une population ! Pourquoi et comment les professeurs haïtiens devraient-ils aborder des sujets aussi sensibles avec les écoliers, qui dans certains cas, évoluent dans des zones rouges, sont des proches, bénéficient de certains privilèges ou sont tout simplement des relais des  groupes armés les plus violents.

Discuter autour de ces sujets demande toute une préparation, de la documentation, des approches pédagogiques et des astuces pour ne pas s’attirer la foudre. Qu’est-ce qu’un gang ? Qu’est-ce qui caractérise les gangs en Haïti ? Quelles sont les dimensions à prendre en compte dans l’histoire et l'évolution des groupes armés dans le pays ? Quels sont les impacts des groupes armés sur le bien-être de la population, et sur le présent et l’avenir de la génération actuelle et future ? Comment la population saine et l’État devraient-ils s’organiser pour lutter contre ce fléau de façon responsable et durable ? Quelles sont les parts de responsabilité des différents acteurs de la société et de l’international dans la dégradation de la situation en Haïti ?   

Dans quel cours enseigné dans le système éducatif haïtien devrait-on retrouver le chapitre qui aborde les vrais problèmes du moment, de l’espace-temps du peuple haïtien ? À travers les sciences sociales pour remonter jusqu’aux origines du cycle de violences politiques et claniques, à travers les cours d’histoire ? Comment les cours de géographie pour présenter la délimitation de l’espace et pour représenter la dynamique des frontières  depuis la colonisation, les habitations, la division du territoire après l’assassinat du père fondateur de la patrie entre république et royaume, les rivalités des groupes armés avant, pendant et après les cycles d'occupation ?

Dans les cours d'économie, il faudrait certainement ajouter un chapitre sur les violences économiques en Haïti, en s’inspirant certainement sur l’un des ouvrages de référence abordant cette problématique, produits par l'économiste et ancien gouverneur Fritz Jean. Plus que jamais, pour la réalisation et la réussite d’une telle initiative, visant à promouvoir une nouvelle forme d’intelligence résiliente pour faire face aux violences de toutes sortes en Haïti, en passant par la violence des groupes armés, il faudra aborder les vraies questions sur l'origine, les caractéristiques et les bénéficiaires des actions et des réalisations, des interventions et de l’expansion des groupes armés ?  Certainement pas ces pauvres jeunes violents, manipulés et inconscients que la police ajoute sur sa liste des victimes mortellement blessées, qui auraient pu servir le pays dans des activités plus nobles.        

Des cours de philosophie pour redéfinir  le sens et l’essence de la vie, pour mieux préparer les jeunes à gérer des crises, à faire face au deuil, à surmonter la peur et à s’organiser pour défendre ses droits et son territoire, mériteraient une certaine actualisation des contenus.  Ces cours prendront en compte un ensemble de valeurs et de principes à respecter pour protéger la vie et les biens, et pour empêcher d’autres jeunes à investir cette nouvelle entreprise déshumanisante de la honte et de l’autodestruction sociale et économique dans la capitale haïtienne et quelques villes de province.

Dans quel établissement scolaire viendra l’initiative d’organiser une journée de réflexion pour discuter de l'insécurité, de la violence et des gangs qui imposent leurs lois dans l’espace haïtien ? Qui seront les principaux intervenants pour aborder sans émotion et de façon objective de telles problématiques ? Quels sont les films, les chansons,  les ouvrages, les poèmes, les citations, les auteurs, les histoires, les images et les messages qu’il faudra partager avec les écoliers haïtiens pour les sensibiliser, les prévenir, les responsabiliser et les impliquer dans une nouvelle campagne pour protéger la population et sauver la vie tant d'innocents que des jeunes recrutés dans les gangs, dont leur avenir se résume aux affrontements entre les groupes armés, aux interventions des forces de l’ordre, et à la justice populaire.    

De quelle organisation de la société civile haïtienne, en collaboration avec les autorités publiques, les partenaires diplomatiques et des organisations internationales, viendra l’initiative d’organiser la semaine de sensibilisation sur les violences dans le système éducatif haïtien ? Plus qu’une simple action cosmétique et médiatique, il faudra mobiliser les ressources autour de la nécessité d’informer et de former les professeurs et les élèves, de sensibiliser et de responsabiliser les parents et les collectivités , d’anticiper et de prévenir les acteurs de la société civile sur l'évolution et la dégradation de ce fléau, qui emportent tellement de vie au pays sans chapeau.   

Dans une journée de réflexion qui sera organisée sur la thématique des violences des groupes armés dans les écoles, les écoliers, les jeunes, les universitaires, les professeurs, les parents et tous les autres acteurs des collectivités vont visiter des expositions, consulter des documents et discuter et appréciés les causes et les conséquences, les influences et les interdépendances et les relations qui déterminent cette nouvelle forme de violence institutionnalisée des groupes armés en Haïti. Il est venu le temps de partager des informations utiles, pratiques et intelligentes capables de promouvoir une nouvelle forme de conscience collective à partir du système éducatif haïtien. L'école comme l’un des premiers piliers pour une véritable transformation sociale.

 

Dominique Domerçant

LAISSEZ UN COMMENTAIRE

0 COMMENTAIRES