La Cour d’appel de Port-au-Prince a annulé, ce lundi 13 octobre 2025, l’ordonnance de clôture rendue par le juge Walter Wesser Voltaire dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moïse. Elle a désigné le juge instructeur Denis Cyprien pour reprendre l’instruction de ce dossier emblématique, marqué par des lenteurs, des controverses et une instabilité persistante aux côtés de la justice haïtienne.
Le juge Voltaire avait inculpé plus de cinquante personnes, dont l’ex-première dame Martine Moïse, l’ancien Premier ministre Claude Joseph, et l’ex-directeur général de la Police nationale, Léon Charles. Mais cette ordonnance, jugée insuffisamment motivée et entachée d’irrégularités, n’a pas résisté à l’examen de la Cour d’appel.
Désormais, le juge Denis Cyprien est chargé de réinstruire l’affaire en profondeur. Il devra réévaluer les éléments du dossier, tant sur le fond que sur la forme, et pourrait solliciter une coopération internationale pour faire avancer l’enquête. Cette nouvelle phase vise à lever les zones d’ombre qui entourent ce crime et à répondre aux critiques sur la gestion précédente du dossier.
Le président Jovenel Moïse a été assassiné dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021, à son domicile de Pèlerin 5. Depuis, l’enquête piétine. En quatre ans, cinq juges d’instruction se sont succédé sans parvenir à faire lumière sur le dossier notamment, le juge Mathieu Chanlatte, premier juge désigné, s’est rapidement déporté, Garry Orélien, nommé ensuite, a été écarté après des accusations de corruption, le juge Chavannes Étienne a également abandonné le dossier. Le magistrat Walter Wesser Voltaire a mené une instruction controversée, qui vient d’être aujourd’hui annulée. Le juge Denis Cyprien prend désormais le relais, dans un climat de scepticisme et d’espoir mêlés.
Depuis l’assassinat, Haïti est plongée dans un vide constitutionnel. L’insécurité généralisée, la faim, le chômage et l’effondrement des institutions étatiques ont profondément détérioré les conditions de vie de la population. Le dossier Moïse est devenu le symbole d’un système judiciaire en crise, incapable jusqu’ici de répondre aux attentes du peuple haïtien.
De son côté, la justice américaine joue sa partition à son rythme. Plusieurs suspects liés au complot ont été arrêtés et inculpés aux États-Unis, notamment Germán Alejandro Rivera Garcia, un ex-officier colombien, condamné à perpétuité par un tribunal fédéral de Miami après avoir plaidé coupable.
D’autres accusés sont en attente de procès, certains ayant vu leurs audiences reportées à mars 2026 en raison du volume considérable de preuves à examiner. Cette soi-disant coopération judiciaire transnationale a montré l’ampleur internationale du complot. L’assassinat de l’ancien chef de l’État Jovenel Moïse implique des mercenaires étrangers, des ressortissants américains, des haïtiens ainsi que des transactions internationales.
Quatre ans après le drame, l’espoir d’une justice véritable repose désormais sur les épaules du juge Denis Cyprien. Le peuple haïtien, meurtri et en quête de vérité, attend des résultats concrets. Cette nouvelle désignation sera-t-elle enfin le tournant décisif dans l’affaire Jovenel Moïse? L’histoire reste à écrire.
Likenton Joseph