Nostalgie

Je me souviens de la capitale et son ambiance de fête

Depuis le patinoire jusqu'à la rue des Fronts Forts

On s’arrêtait à Cabane Choucoune pour danser

Les croyants allaient prier à l'église Saint-Pierre,

Aux mosquées, aux temples ou dans un onfò quelque part ;

Les athées riaient du chemin de croix en mémoire de l’homme

crucifié par Rome que font les chrétiens pendant le carême.

Pour les jeux de société on alternait les lieux de rencontres

 

Pour aller en ville, on passait par la route de Bourdon, 

Arrivés à Lalue, nous les enfants étions tout contents

D’aller  chez Coles pour acheter des dragées et du chocolat,

Parvenus devant les Sœurs de Lalue ,

Au coin du Chemin-des-Dalles, nous passions devant

Les ébénisteries du trottoir, puis  nous nous dirigions

Vers le Lycée des Jeunes Filles et autres écoles secondaires

Nous apprécions ces lieux peuplés de belles demoiselles

Puis on allait aux Champs-de-Mars

Au Paramount retrouver nos pairs

Pour discuter de Sampeur, Lhérisson,  Vilaire

Jacques Roumain, Jacques-Stephen Alexis

Firmin et autres  grands écrivains en  Haïti ;

Aux pieds des  statues des pères de la nation

Qui inspiraient nos âmes rebelles.

On  chantait  la Dessalinienne

Au collège Saint-Pierre  nous allions jouer au volley-ball,

Puis au Rex-Théâtre  écouter le compas, 

Juste à côté, au petit café, on s’offrait de la crème glacée.

Nous étions des athlètes étudiants

Qui apprenaient à nous émanciper.

 

Autour du kiosque Occide Jeanty

Où l'orchestre du palais jouait 1804,

Il y avait des cordonniers,

Des petits entrepreneurs soucieux

De nourrir leurs progénitures. 

 

À HAMCO non loin de la rue Lamarre 

La rue du Petit-Séminaire 

Où nous nous rendions pour acheter de la charcuterie ;

Au Boulevard Jean-Jacques Dessalines, 

Connu comme la Grand-Rue

Il y avait le marché Hyppolite.

Le boulevard était vibrant, achalandé et riche

Des magasins des deux côtés, 

Bien approvisionnés  

Et d’une propreté immaculée.

Pour les périodes de fin d’année, 

Les signaux lumineux exigés par la présidence

 Clignotaient. La ville était belle et joyeuse

Mais la dictature avait mis en place 

Des pions qui étouffaient dans l’œuf toute résistance.

 

Chacun allait et venait, chacun avait une place.

Bien que les macoutes, maîtres de l’effroi,

Renforçaient la peur et assuraient l’obéissance.

 

Puis au Bicentenaire, droit au Bec Fin,  

Pour un hamburger américain,

Prendre de l’air au Quai Colomb

Regarder aller et venir les grands paquebots

Débarquer et embarquer des touristes

Qui se rendaient et revenaient des casinos

À la recherche de l’exotisme.

 

Haïti fut une destination où il faisait bon de vivre 

Même si c’était pour un bref moment.

Lumane Casimir chantait

« Haïti chérie, a la yon bel ti payi »

Ce fut le refrain au Théâtre de Verdure

Là nous nous rencontrions, nous l’espoir et l’avenir

Nous avancions à tâtons dans l’aventure de la vie.

Apprenant à marcher avec la tête haute et altière.

Au-delà du Bicentenaire en  Plaine près de  Damien

Nous allions pour l’équitation ou des parties de chasse.

À Luly nous nous rendions

Jouir des plages et faire des plongées sous-marines

 

Les gens du peuple ne marchaient pas pieds nus.

Ils pouvaient s’acheter des chaussures,

Et des sandales près de l’Hôpital Général .

Personne ne portait de vêtements usagés.

La dignité était placée bien haut 

Sur un piédestal fait de bois gaïac et de chêne.

La ville était propre, les maisons peintes couleur de joie

On ramassait les ordures et sur les murs des rues

On peignait des fresques des héros de Vertières.

Pour le 18 mai les gens  paradaient et chantaient

L’hymne à la jeunesse. On la connaissait par cœur

C’est nous les grands et les petits 

Demain la gloire d’Haïti..…”

 

William Savary

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