Collation de diplômes des boursiers haïtiens en Italie

Plus d’une vingtaine de boursiers de l’État haïtien viennent de boucler leurs études en sciences médicales et paramédicales dans une université italienne. Le samedi 4 décembre 2021, l’Ambassade d’Haïti en Italie a voulu marquer l’événement en organisant une grande cérémonie pour la remise de diplômes avec les responsables de l’université italienne et en présence de diplomates haïtiens.

Université Unicamillus, banlieue de Rome. C’est dans cet établissement où les jeunes Haïtiens ont fait leurs études, qu’a eu lieu une grande cérémonie de remise de diplômes aux boursiers haïtiens. Une rencontre monstre qui a réuni plus de 150 personnes et duré plus de trois heures. Dans l’assistance, on a remarqué la présence de l’ambassadeur d’Haïti en Espagne, Louis Marie Saintil, des consuls et chef de poste a.i M. Richardson Étienne (Paris) et Garry Assad (Guyane française). Par ailleurs une délégation de nos missions diplomatiques en France était présente, composée de Pierre Louis Laguerre, Richie Cyprien, Rosalvo Janvier, Maguet Delva, Naïca Buiserreth etc.

 

Le chargé d’Affaire, Maître Emmanuel Charles, a mis les petits plats dans les grands pour donner à cette cérémonie un aspect solennel. Avant de prononcer son discours, le diplomate a demandé à l’assistance d’observer une minute de recueillement à la mémoire de l’ex-Président Jovenel Moïse, assassiné dans sa résidence privée dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021 en Haïti. Retraçant la genèse de cette coopération dont il a été le fer de lance en tant que représentant de l’État haïtien, il a expliqué que ces bourses d’études sont le fruit de la coopération initiée par le Président italien Sergio Mattarella et son homologue haïtien lors de la visite officielle feu Jovenel Moïse à Rome du 24 au 28 janvier 2018. La mise en œuvre de cette coopération éducative a ensuite été mise en œuvre par le Recteur de l’université Gianni Profita et Emmanuel Charles qui a remué ciel et terre pour faire aboutir ce projet.

 

Au bout de trois années d’études, 25 étudiants haïtiens ont obtenu leurs diplômes dans quatre domaines en médecine et para médicale : physiothérapie, sciences infirmières, technique de laboratoire, radiologie, sage-femme etc.

 

Quatre compatriotes prêtres, Barthelemy Guelcé Abellard, Thomas Dieunico Augustin et Gerome Rousta Fredny ont assuré la partie religieuse de la cérémonie. Dans son allocution, Barthelemy Guelcé, le présentateur principal de la cérémonie, a exhorté nos compatriotes à être compréhensifs à l’égard des futurs malades dont ils auront à s’occuper en Haïti ou ailleurs en s’appuyant sur l’enseignement du pape Benoît XVI qui, dans son discours aux opérateurs sanitaires, le 17 novembre 2012 eut à dire : « C’est seulement, quand vous vous préoccupés du bien-être de vos patients, les hôpitaux deviennent un lieu où la relation de soins n'est pas un métier ou un simple boulot, mais une vocation ou une mission ».

 

« Une pépite d’or »

Après la prière, l’hymne national a retenti dans les locaux de l’université avec tous les apparats diplomatiques habituels. Ce qui est normal car ces étudiants symbolisent les relations diplomatiques entre deux pays. N’est-ce pas un accord bilatéral mis au point par les deux gouvernements et dont l’ambassade d’Haïti en Italie a assuré le suivi, qui leur a permis d’être en Italie ?

 

Tout de suite après l’entonnement de la Dessalienne, c’était au tour de Gianni Profita de vanter, en présence de plusieurs professeurs italiens, les qualités de nos étudiants et leurs performances respectives dans les domaines qu’ils avaient choisis. Il a ensuite souligné la mission d'UniCamillus qui est d'améliorer les conditions de santé des pays moins favorisés en formant de nouvelles générations de professionnels de la santé. « Aujourd'hui, nous avons ici les premiers excellents professionnels de la santé », a-t-il déclaré avec fierté. Il a ajouté que les débuts n'ont pas été faciles, « mais la clairvoyance et la persévérance absolue du Chargé d’affaires Emmanuel Charles ont permis au programme de se développer et de réussir ». L’Italien est satisfait des résultats. « Les jeunes étudiants d'Haïti ont obtenu de très bons diplômes avec des notes très élevées. Ils ont respecté l'engagement d'étudier avec passion pour devenir des protagonistes du changement. »

 

Beaucoup reconnaissent en effet que c’est un exploit d’avoir effectué des études dans un pays non francophone et de les avoir réussies avec brio. Parmi eux, on compte même quatre lauréats :  Delva Dave, Dieunane Ledoux, Camille Jerry Jules, Archibald Cinéus Fatherson Jeanverlin.

 

Par ailleurs, le recteur a annoncé son désir de continuer à intensifier les relations entre les universités d’État d’Haïti et Unicamillus avant de remettre les parchemins aux vingt-cinq diplômés. Pour chacun d’eux, il a eu des mots de félicitations. Jamais le couplet figuré dans notre hymne national « formons des fils » n’avait trouvé son sens sociologique que dans cette atmosphère-là où des compatriotes formés en Italie, qui plus est, dans un domaine, la santé, une branche, dont nos besoins sont plus que criants.

 

Trois étudiants, dont Archibald Cinéus Fatherson Jeanverlin, ont ensuite relaté les péripéties qu’ils ont connues pendant leurs études. Jean Philippe Charles, diplômé en radiologie, a aussi parlé des difficultés de s’adapter non seulement au climat, mais aussi aux méthodes d’enseignement.

 

Une diplômée sage-femme, Louis Laure Tahinda, avait la voix brisée par l’émotion lorsqu’elle décrivait le chemin parcouru et combien elle est aussi fière de son diplôme avant de remercier ceux qui ont rendu cela possible. L’ancien Directeur général du ministère des Affaires étrangères, Fortuné Dorléans, l’ancien ministre conseiller à l’ambassade de la République d’Haïti, Frisnel Azor, faisaient partie de toute cette chaîne de solidarité qui s’était mise sur pied.

 

Prenant à son tour le micro, le professeur Fabio D’Agostino, responsable de la scolarité des étudiants, a témoigné de leur rapide adaptation en comparaison avec d’autres étudiants étrangers.

 

« Promotion Toussaint Louverture »

S’il y a une intervention qui était particulièrement attendue, c’est bien celle de l’organisatrice, Sylvie Dadjo. C’est elle qui dans les coulisses s’est occupée des inscriptions depuis Haïti en synergie avec la direction de l’université en Italie. Marraine de la promotion, cette Béninoise, docteure de l’université, s’était livrée à un vrai parcours de combattant. Elle se voit elle-même « la cheville ouvrière » de ce qu’elle appelle une « réussite exceptionnelle sous la direction éclairée de maître Emmanuel Charles qui fait preuve d’un combattant ». Pendant des mois, Dadjo était perpétuellement en contact avec les étudiants en Haïti afin de les « mettre dans le bain » avant leur arrivée en Italie. Dans son intervention, elle a déclaré que le nom de Toussaint Louverture attribuée à cette première promotion n’a pas été choisi en vain. « Vous connaissez l’histoire de Toussaint Louverture, ce géant de l’humanité, qui a su avec dextérité diriger Saint-Domingue et permettre à la race noire de s’émanciper. Haïti est liée à l’Afrique, ils sont toujours au rendez-vous historique. N’est-ce pas que Toussaint Louverture est d’origine béninoise comme moi marraine de la promotion portant son auguste ! Vous n’avez pas oublié vos racines historiques ! »

 

L’universitaire en a profité pour évoquer l’apport historique d’Haïti à la décolonisation de l’Afrique tout en soulignant la frappante ressemblance physique entre l’Haïtien et le Béninois et la survivance de mots de l’une des langues de l’ancien Dahomey dans le créole. Au-delà de l’histoire, Mme Dadjo trouve aujourd’hui des « coïncidences heureuses », par le fait qu’en tant que Béninoise, elle s’est engagée dans ce projet « conçu et mis en œuvre par ces deux hommes ayant un capital social inestimable avec lesquels j’ai eu l’honneur de collaborer. », en l’occurrence le professeur Gianni Profita et  Emmanuel Charles. »

 

Pendant les trois années, les relations entre notre ambassade en Italie et nos boursiers n’ont jamais été rompues. Le chef de mission Emmanuel Charles, veillait à ce que nos compatriotes réussissent et tout a été mis en œuvre en ce sens. Des plaques ont été distribuées aux vingt-cinq récipiendaires.

 

Parmi ceux qui ont travaillé d’arrache-pied à ce que ce rêve soit une réalité, un nom est souvent évoqué. Il s’agit de la doctoresse Yolène Vaval Surena, malheureusement décédée. Une femme au grand cœur qui est intervenue à plusieurs reprises pour accélérer le processus. Une plaque posthume sera remise à sa famille à titre d’hommage. « Ce départ est une grande perte pour Haïti, a signalé Me Charles. Femme de courage et de grande vision, fonctionnaire de carrière dans l’Administration publique haïtienne, volontaire à la Croix-Rouge haïtienne, conceptrice du système national de gestion de risque et de désastre, première directrice de la Protection civile en Haïti, défenseure fervente et accompagnatrice des jeunes, professeure d'université, ce sont autant de qualités qui ont fait d’elle une femme accomplie, un vrai modèle pour la jeunesse haïtienne, qui nous rendent également fiers d'elle. » Le représentant haïtien a terminé son intervention en souhaitant que chaque diplômé soit « un ou une Yolène Vaval Surena » pour la nouvelle Haïti en train d’être construite.

Maguet Delva

Rome Italie

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