Cancer du sein, une expérience déchirante qui transforme

Depuis plus de 30 ans,  le mois d’octobre accueille un peu partout dans le monde l’évènement « Octobre rose ». Remontant aux années 1980 aux États-Unis d’Amérique, il consiste en une campagne annuelle de sensibilisation au dépistage et à la collecte de fonds pour la recherche sur le cancer et spécialement le cancer du sein.

En Haïti, le groupe de support contre le cancer « GSCC »  a encore une fois comme chaque année célébré l’octobre rose à travers des séances de dépistages, de collectes de fonds et de sensibilisation.

Si le cancer est une maladie redoutable, le cancer du sein sans se démarquer de l’ensemble est en fait une expérience déchirante. Il est autant ingénieux d’éduquer la population à la prévention ou au dépistage précoce que d’offrir l’estrade aux survivantes du cancer ; qu’elles racontent l’expérience, créent une mémoire d’où un puits d’espoir pour celles qui l’ont vécu ou qui le vivent aujourd’hui.    

 Le cancer du sein une expérience déchirante 

 Nathalie Bélizaire se souvient comment il a été déstabilisant d’entendre  son diagnostic de cancer du sein en 2013. Cela a été plus qu’un combat, mais une nouvelle réalité à affronter au quotidien comme le raconte Francesca Paul qui a été diagnostiquée d’un cancer du sein alors qu’elle n’avait que 27 ans.  Outre les malaises physiques, le cancer du sein attaquerait même  la féminité de la femme selon  Nathalie qui aujourd’hui se réjouit de sa santé, 8 ans après.

Des changements brutaux du quotidien

Le cancer vous arrache brutalement de vos habitudes admet Francesca qui a dû quitter son travail d’infirmière pour suivre le traitement qui est très couteux, mais qui nécessite surtout un support moral des proches. À cet effet, Guirlène Mascary revient 16 ans en arrière sur son expérience douloureuse, sortant justement d’un divorce avec plusieurs enfants à sa charge, elle a connu le pire  quand elle ne put compter que sur elle-même dans les  premiers instants de sa maladie.

Francesca avec un meilleur sort a quant à elle accepté avec le temps les changements drastiques dans son alimentation, son emploi du temps ; bénéfices de l’accompagnement inconditionnel de ses proches et ses croyances religieuses.

Des facteurs de bon pronostic

Un diagnostic de cancer ne signe pas illico votre mort, tout dépend du stade de la maladie à sa découverte, le diagnostic précoce est un facteur de bon pronostic. Un avis que partage Nathalie qui conseille à toute femme d’apprendre à connaitre son corps, être attentive à tout changement. Guirlene emprunte la même trajectoire jusqu’à exhorter les femmes à voir un médecin face tout changement remarqué au niveau de leur sein. Nous devons noter que 9 femmes sur 10 guérissent du cancer du sein s’il est diagnostiqué à un stade précoce.

Quant à Francesca, elle insiste sur les responsabilités de l’environnement direct de la malade ; de l’encadrer, l’épauler, ce qui rend plus supportable la longue et dure période de traitement.

Entre résiliences et transformations

Si les répercussions physiques, mentales et économiques varient d’une personne à l’autre, le cancer du sein est une épreuve difficile qui  marque profondément  la vie des malades. « Le cancer du sein m’a changée, renforce mon caractère face aux épreuves de la vie, je supporte mieux les problèmes et je me dis souvent que si j’ai vaincu le cancer, de quoi dois-je avoir peur »nous confie Francesca qui porte aujourd’hui un bébé après deux ans de mariage.

« C’est une épreuve qui m’a marqué pour la vie » témoigne Nathalie qui nous accorde qu’elle identifie désormais ce qui est vraiment important dans la vie. Outre la résilience, Nathalie est passée d’une malade du cancer à une activiste pour la cause des personnes malades ; elle est à cheval entre le  groupe de support contre le cancer (GSCC) et la fondation haïtienne anti-cancer infantile (FHACI). Nathalie Bélizaire est aujourd’hui une des personnes les plus investies dans la lutte contre le cancer en Haïti.

Une survivante du cancer est une source d’inspiration pour les personnes qui vivent avec la maladie ou pour tout individu confronté à ces situations difficiles, une démonstration de force, de courage et surtout d’altruisme. Si Guirlène Mascary a été aidée comme les deux précédentes  survivantes par le GSCC, elle est tout heureuse de partager qu’elle a été membre d’une équipe de sensibilisation sur le cancer du sein pour un hôpital à Tabarre il y a trois ans. Elle ne rate jamais l’occasion d’aider, de partager son expérience quand il est question de supporter les autres.

Des responsabilités envers les malades du cancer

L’état central et la société civile doivent assumer des responsabilités à l’ égard des malades du cancer. Ce sont des déchirants souvenirs quand Francesca et Guirlène expliquent les fréquents voyages à l’étranger qu’elles ont dû effectuer pour bénéficier des séances de radiothérapie, service qui n’existe pas encore en Haïti. Les coûts exorbitants et la fatigue extrême  forment ce couple pressurant. Selon madame Paul, l’état devrait développer toute une politique adressant le coût et la disponibilité des traitements en Haïti, une initiative que le secteur privé des affaires pourrait aussi envisager.

Quant à Nathalie, elle croit que les sensibilisations au dépistage du cancer du sein devraient être un élément clé de l’agenda de tout acteur social. Si le GSCC existe depuis 20 ans, la société haïtienne d’oncologie (SHONC), l’institut haïtien d’oncologie (IHDO) et l’IHI sont de ces rares institutions qui encadrent les malades du cancer en Haïti.

Guirlène, quant à elle, croit que les survivantes du cancer sont un levier d’encouragement pour les malades, leur donner la parole et le champ est une bonne orientation de la lutte anti-cancer.

Alors que le cancer du sein concerne aussi les hommes, car en plus d’être frère, époux, conjoint ou fils, moins de  1% des cancers du sein dans le monde seraient diagnostiqués chez des hommes. Il devient alors un combat universel allant au-delà de toute différence sociale, économique, ethnique et de genre ou de sexe.  

B. Charlemagne Charlorin

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