« Haïti est de plus en plus pénalisée par l'exode des cerveaux », déplore le politologue Mathias Devert

Depuis quelque temps, Haïti est l'un des pays en tête des sociétés victimes de la fuite des cerveaux. La migration qui touche tous les secteurs du pays est devenue une forme de passage obligé pour les citoyens haïtiens. Pour fuir la violence des gangs armés, pour pouvoir faire face aux problèmes économiques et humanitaires qui rongent la population, entre autres, des milliers de citoyens haïtiens sont obligés de quitter le pays à tout prix, ce, vers d’autres cieux beaucoup plus cléments. Le politologue Mathias Devert se désole qu'Haïti continue de perdre ses mains-d’œuvre et/ou ses professionnels compétents et qualifiés.

« Lorsqu'un pays accepte de recevoir des migrants, ce n'est jamais dans l'intérêt de ces pays qui font face à une crise (sécuritaire, humanitaire, économique). C'est surtout dans leurs propres intérêts. Les migrants ne vont que combler les vides de ces pays-là qui ont grand besoin de main-d’œuvre bon marché, vu que certains emplois sont réalisables uniquement par des migrants », a déclaré le politologue Mathias Devert, qui a également souligné que recevoir des migrants est bénéfique pour certains pays, notamment les plus développés, qui sont en quête de potentiels travailleurs, et des pays comme Haïti sont des pourvoyeurs de main-d’œuvre, que ce soit pour les États-Unis, le Canada ou la France, dit-il.

Toutefois, il dénonce que si certains pays ouvrent leurs portes pour accueillir notamment des citoyens haïtiens, c'est parce que notre pays fait face à une crise humanitaire sans précédent. Les droits de plus d'un sont bafoués, à peine si certaines gens peuvent manger, les plus démunis ne savent à quel saint se vouer. Alors, qui peut les empêcher de prendre la fuite quand des bandits de tout poil les terrorisent sous les yeux des autorités concernées ? Se demande Mathias Devert.

Ces nombreux programmes humanitaires actuellement sont beaucoup plus déficitaires pour Haïti. Nous perdons des professionnels compétents, nous perdons nos mains-d’œuvre qualifiées. « On ne peut construire un pays sans une main-d’œuvre compétente. De véritables professeurs, avocats, professionnels de la santé, ingénieurs, ouvriers, communicateurs, techniciens, ont dû prendre la fuite, certains ont même fait le vœu de ne plus revenir. C'est catastrophique pour notre pays. La fuite des cerveaux est trop criante en Haïti. Certains étudiants commencent à se plaindre à cause des professeurs qui ont quitté Haïti pour se rendre aux États-Unis dans le cadre du programme humanitaire lancé par l’administration Biden. Des gens ont délaissé l'agriculture, on aura une baisse dans la production agricole, et c’est l'un des effets négatifs de la migration. La fuite du capital humain est extrêmement négative pour Haïti », a-t-il expliqué.

Néanmoins, le politologue avance un point qu'il estime être positif en ce qui concerne la migration, c'est le transfert d’argent de la diaspora qui occupe une grande partie du PIB d’Haïti. « Certaines personnes arrivent à se scolariser ou à habiter dans une maison décente grâce aux transferts de la diaspora. Ces transferts aident beaucoup de ménages à prendre soin de leurs progénitures ou à s'en sortir », a soulevé Mathias Devert. « Mais je pense que la diaspora devrait s'impliquer beaucoup plus dans les affaires du pays. Elle doit se montrer dans le but d'avoir un impact plus direct et durable sur l'économie du pays. Un pont doit être créé entre la diaspora et la communauté haïtienne en Haïti afin de canaliser et faciliter les investissements de la diaspora dans des secteurs qui peuvent avoir un impact sur différents domaines de la société, question de booster l’économie à un rythme exponentiel », a argumenté le MSc en relations internationales.

Enfin, M. Devert appelle les autorités concernées à passer à la résolution de la crise multidimensionnelle qui gangrène le pays en posant les problèmes de base afin de mieux élaborer un projet sociétal, ce qui donnera aux Haïtiens, particulièrement les jeunes, l'envie de rester au pays.


Vladimir Predvil

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