Camille Leblanc donne son avis sur le Conseil présidentiel de transition (CPT)

Le camp des pro-CPT semble avoir gagné contre celui de ses adversaires qui soutenaient le choix d’un juge de la Cour de cassation. Interrogé à ce sujet sur Vision 2000, l’ancien ministre de la Justice, Camille Leblanc, donne son avis sur le choix de membres de la société civile dont il doute de la réussite, vu l’énormité de la tache.

Dans une note datée du 29 mars dernier, Camille Leblanc évoquait la « dangereuse aventure » du Conseil présidentiel de transition (CPT). Pragmatique, il fait aujourd’hui contre mauvaise fortune bon cœur. Il va jusqu’à souhaiter bonne chance au gouvernement à sept têtes qui s’est mis en place, car « le temps presse » et qu’il ne se résout pas à se faire passer pour un oiseau de mauvais augure. « Je ne veux pas qu’on dise que je bloque les choses », se justifie-t-il.

Il demande même à la population « d’aider à la réussite » de cette nouvelle autorité. Mais Camille Leblanc affirme sans tout de même « qu’il ne croit en cette formule » et qu’il doute même que cette équipe puisse relever les énormes défis qui l’attendent, notamment le problème de l’insécurité et la misère.

D’abord, les nouveaux dirigeants venus de secteurs différents auront-ils la capacité de travailler ensemble pour rétablir l’ordre public qui est par terre et sortir le pays de l’interminable transition ? Bref, mettre notre nation meurtrie sur les rails de l’État de droit ? se demande-t-il. Leblanc en doute fort. « Mais s’ils y arrivent, ce serait une victoire… Je me laisse surprendre ! »

Camille Leblanc est persuadé qu’avec le choix d’un Juge de la Cour de cassation, comme le prévoit la loi-mère, il y aurait eu « moins de querelles de chapelle », tout en insistant sur le fait qu’il n’est pas forcément pour telle ou telle personnalité déterminée. C’est l’institution qui importe. De plus, la Constitution prévoit dans sa lettre comme dans son esprit que le pouvoir politique, en cas de vacance des deux chefs de l’Exécutif, doit automatiquement revenir à l’un des trois pouvoirs d’État. Il n’est dit nulle part que c’est à des groupes de la société civile d’assumer une telle tâche.

Comme la journaliste Marie-Lucie Bonhomme qui l’interviewait rappelait que la constitution de 1987 amendée en 2011 ne prévoyait plus le recours à la Cour de cassation, mais au Parlement, Leblanc explique qu’il se réfère à la version créole de 1987 qui, elle, n’a pas subi de modification, tout en critiquant « l’escroquerie » derrière cette décision de changement. Il y voit carrément une tentative de centralisation des trois pouvoirs et même une mise à l’index du créole puisque l’amendement d’il y a 13 ans n’a concerné que le texte français.

Toujours est-il qu’il redoute que les membres du CPT, dépourvus de référence constitutionnelle, ne se décident à garder la haute main sur le pouvoir.

« Désarmer les gangs »

À la question sur la manière de pacifier le pays, Leblanc estime que si les responsables font un « bon diagnostic », le « traitement » n’en sera que plus « facile ». Il en est de même pour la crise de la gouvernance, la solution est dans la loi-mère et non dans la création de clans d’intérêt.

En ce qui concerne les gangs qu’il qualifie de « terroristes », ils obéiraient à une « politique de terreur avec des objectifs bien précis », tout en laissant entendre l’existence d’une main invisible, mais sans la nommer. En venant avec un discours politique, armes au poing et répandant la terreur, on peut être difficilement audible, dit-il. « Si ces gens veulent s’engager en politique, qu’ils déposent les armes et prennent le chemin de la paix ! » Pour l’homme de loi, « la violence n’est tout simplement pas acceptable ».

Pour désarmer les bandits, Leblanc indique qu’il faut d’abord des « informations sûres » et ensuite des « moyens appropriés ». Il croit qu’on peut aussi intégrer l’armée dans cette bataille. Avec ou sans force multinationale, on doit contraindre les gangs à déposer les armes et les autorités devraient, ensuite, prendre en charge les jeunes en leur offrant une issue pour qu’ils ne replongent pas dans la criminalité organisée.

Fustigeant la pratique de « non-solidarité » des nantis, Camille Leblanc estime en dernière instance que les riches devraient accepter de payer des taxes afin de permettre à l’État de mettre en place des structures de solidarité. C’est plus éthique, plus patriotique pour cette classe aisée au lieu de payer des gangs pour assurer la sécurité de leurs vies et de leurs biens. Il en est de même des politiciens qui travaillent avec les malfrats pour prendre le pouvoir ou pour y rester. Qu’ils prennent tous le chemin de la loi régissant la vie en démocratie ! La paix sociale est à ce prix.

 

Huguette Hérard

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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