Le CARDH et le RNDDH condamnent le comportement des agents de la PNH contre les déplacés de Tabarre

À travers des notes, le Centre d’analyse et de recherche en droit de l’homme ( CARDH ) et le Réseau national de Défense des droits humains (RNDDH) ont dénoncé la violation des droits de la population de Tabarre qui avaient pris refuge à l'entrée de l'ambassade des États-Unis en Haïti. Ces deux organisations de défense des droits humains appellent la Police nationale d’Haïti à se mettre du côté de la population qui ne cesse d’être victime des gangs armés. « Gazer des femmes avec des nourrissons et des enfants en bas âge, forçant les déplacés internes à quitter l’entrée de l’Ambassade des États-Unis en Haïti, environ 48 heures après, est inacceptable et constitue une violation de droits humains. », a fait savoir le CARDH. 

 

En effet, la violence du gang Kraze Baryè s’est exacerbée. Le 23 juillet 2023, les quartiers Truittier et Dumornay (commune de Tabarre) ont été particulièrement attaqués. Quelques dizaines de déplacés internes, dont des femmes avec des enfants en bas âges, se sont réfugiés devant les locaux de l’Ambassade des États-Unis d’Amérique.

 

Au moins cent quarante-un déplacés, issus des quartiers de Truitier, Dumorney, Galette, Moquette et Colofè ont été recensés le 26 juillet (matinée) au lycée Jean Marie Vincent, dont 27 garçonnets et 47 fillettes. Selon le rapport du CARDH, parmi les enfants gazés, quatre sont dans un état préoccupant, dont Mayiva Joseph âgée d’un an. Une personne âgée, répondant au nom de Mila Volcy, a été admise à l’hôpital, selon sa cousine Flérilus Gertrude dont les yeux sont dans un état critique. Figernie Pierre-Charles s’était évanouie après avoir été gazée. 

 

« Les déplacés n’avaient bénéficié ni l’appui de l’Office national de la migration ni celui de la direction générale de la Protection civile ou des autorités locales, dont la mairie de Tabarre. Ils avaient reçu quelques choses à manger d’un particulier ( prêtre) selon les témoignages de quelques d’entre eux », déplore le CARDH.

 

Le Centre d’analyse et de recherche en droit de l’homme qui a également souligné dans son rapport que le 25 juillet la police a mené une opération dans certaines zones de Tabarre, dont Dumorney, qui a permis d’isoler les bandits, explique, qu'aucun d’entre eux n’aurait été ni arrêté, ni stoppé, et  aucune information n’a été fournie sur l’opération. « Ce jour-là, aux environs de 2h p.m. des policiers de l’Unité départementale de l’Ouest (UDMO) ont demandé aux déplacés de quitter l’entrée de l’Ambassade, sous prétexte de faciliter les opérations policières, selon leur témoignage. Les déplacés n’ont pas voulu quitter l’espace, affirmant qu’ils n’avaient pas d’autres endroits à habiter et qu’ils seraient pourchassés par les bandits. Ils ont été automatiquement gazés et forcés de vider les lieux : des nourrissons et enfants en bas âge ont été évanouis, incluant des femmes âgées. Ils ont ensuite été emmenés au lycée Jean Marie Vincent, communément appelé lycée Caradeux, par la mairie de Tabarre. », révèlent les responsables du Centre d’analyse et de recherche en droit de l’homme.

 

Dans ce contexte de crise sécuritaire délétère dans lequel le pays est plongé, la recrudescence de l’insécurité doit préoccuper l’État qui doit agir via le gouvernement qui a l’obligation de garantir l’exercice et la jouissance des droits des citoyens, respecter, protéger et mettre en œuvre la police, dont la mission est de « protéger et servir », rappelle cet organisme de défense des droits humains. Aussi, pour ladite organisation, la coopération internationale a l’obligation d’agir au nom du principe de la « responsabilité de protéger » et une force internationale adaptée pour accompagner la police nationale d’Haïti dans le rétablissement de la sécurité en ouvrant les principaux axes routiers délogeant les gangs, renforçant la police en équipements, formations, technologie et autres et favorisant la libre circulation des personnes et des biens s’avère indiscutable, estime ledit organisme. 

 

Toujours dans son rapport, le CARDH a relaté que depuis le mois de juin 2023, les actes de terreur ont resurgi à Tabarre. Le gang Kraze Baryè a fait irruption dans des résidences privées et entreprises, y enlevant des gens. Le 7 juin 2023, à Torcel, la résidence d’Evalière Beauplan, ancien sénateur du Nord-Ouest, a été attaquée. De plus, les bandits ont été repoussés grâce aux moyens de sécurité dont il disposait et à l’intervention de la police. « Dans la nuit du 12 au 13 juin, les locaux de la Sun Auto, concessionnaire des véhicules Honda/ Hyundai, hébergeant aussi le consulat de la Jamaïque, ont été attaqués, des biens ont été détruits et des agents de sécurité ont été enlevés. « Cette nuit-là, la journaliste Marie Lucie Bonhomme a été enlevée chez elle, conduite au fief du gang et relâchée plus tard. » 

 

En outre, dans son rapport en date du 26 juillet 2023, le CARDH a rapporté que le 17 juin 2023, Pierre Richard Joseph, directeur régional l’Autorité portuaire nationale (APN) du Nord a été enlevé à Torcel , son chauffeur a été tué. Et le 19 juin, le directeur de la compagnie Vorbe et fils matériaux (V&FM) a été enlevé dans les locaux de l’entreprise. Le 20 juin 2023, Pierre Louis Opont, conjoint de la journaliste Bonhomme et ancien président du Conseil électoral provisoire (CEP) de 2015, a été enlevé en rentrant chez lui. Il est encore aux mains des ravisseurs, a signalé ladite organisation de défense des droits humains. 

 

Le Réseau national de défense des droits humains qui a également dénoncé la violation des droits humains dans le pays notamment à l’encontre des déplacés des quartiers de Tabarre ces jours-ci, en a profité dans son rapport en date du 26 juillet 2023, pour souligner à l’attention de tous-tes que depuis le 15 janvier 2023, Vitelhomme Innocent, présenté par plus d’un comme le protégé de Frantz Elbe et de certains autres hauts gradés de la PNH circule dans un cortège composé entre autres de deux  véhicules portant respectivement des plaques d’immatriculation Service de l’État et Officiel et d’un véhicule de l’institution policière de marque Toyota Pick-up double cabine immatriculé 1-01191 clairement identifié comme appartenant à la PNH.

 

 « De plus, le 16 juillet 2023, vers 20:00 heures, douze (12) véhicules portant des plaques d’immatriculation Service de l’État et Officiel, se sont rendus dans le fief de Vitelhomme Innocent où s’est tenue une rencontre de plusieurs heures. Depuis, les attaques de Vitelhomme Innocent à l’encontre des populations de la Croix-deBouquets, de Delmas, de Pétion-ville et de Tabarre se sont intensifiées », a rapporté le RNDDH qui dit condamner avec la dernière rigueur, l’utilisation outrancière de la force par des agents de la PNH, à l’encontre d’une population livrée à elle-même et qui, en se rendant devant les locaux de l’Ambassade des États-Unis en Haïti, n’a voulu que chercher refuge.

 

Le RNDDH rappelle que le droit de chercher refuge toutes les fois que sa vie, sa 

sécurité ou tous autres droits et libertés fondamentaux sont menacés ou violés, est reconnu à toute personne. « De même, il est interdit de refouler une personne cherchant refuge, dans les lieux où sa vie et sa liberté sont menacées. »

 

 

Parallèment, le RNDDH souligne à l’attention du directeur a.i. de la Police nationale d’Haïti, Frantz Elbe que l’utilisation de gaz lacrymogène à l’encontre d’une population calme et sans défense qui cherche refuge pour sauver sa vie, reste et demeure une violation des droits humains, peu importe le groupe d’individus auquel le directeur général a.i. de la PNH veut faire plaisir.  En ce sens, le RNDDH  via son communiqué, dit prendre note de la décision de la mairie de Tabarre de déplacer les réfugiés-es et regrette qu’elle ne soit survenue qu’après que les victimes eurent été gazées par les agents de l’ordre. « Le RNDDH en profite pour inviter la mairie à ne pas leur mettre la pression pour qu’elles laissent rapidement le local où elles sont aujourd’hui accueillies, comme cela a déjà été enregistré par le passé. »

 

In fine, le Réseau national de défense des droits Humains ( RNDDH ) juge inacceptable l’inertie des institutions étatiques dont les ministères de l’Intérieur et des Collectivités territoriales, des Affaires sociales et du travail et à la condition féminine et aux droits des Femmes qui auraient dû rapidement intervenir, le premier, à travers la protection civile, les autres à travers des programmes de protection rapide, en vue de rencontrer les victimes, les recenser, discuter avec elles pour dégager une alternative acceptable pour tous et toutes, les déplacer et les accueillir provisoirement dans un lieu sécuritaire en attendant la résolution définitive du problème d’insécurité dans leur zone de provenance.

 

Vladimir Predvil 

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