La légalisation du cannabis inquiète l’organe de contrôle des stupéfiants de l’ONU

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L’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) rappelle dans son Rapport annuel 2022 que la légalisation de l’usage non médical du cannabis contrevient à la Convention unique sur les stupéfiants de 1961, mais il déplore avant tout que la vente libre entraine une augmentation de la consommation et une baisse de la perception du risque, en particulier chez les jeunes. 

Selon les auteurs du rapport, l’effet le plus préoccupant de la légalisation du cannabis réside dans l’accroissement probable de la consommation, en particulier chez les jeunes. Aux États-Unis, il a été démontré que les adolescents et les jeunes adultes consomment beaucoup plus de cannabis dans les États où il a été légalisé.   

 L’OICS assure aussi que la grande disponibilité, et l’apparition de nouvelles variantes, tels que les produits comestibles (les edibles) ou les kits de vapotage vendus dans des emballages attrayants, ont contribué à une banalisation des impacts de la consommation de cannabis aux yeux du public et en particulier des jeunes. 

 « L’industrie du cannabis connait une expansion et le marketing de ses produits vise les jeunes.  C’est une source majeure de préoccupation, alors que l’on constate que, de leur côté, les effets néfastes associés à l’utilisation de produits de cannabis à forte puissance sont minimisés », a déclaré le président de l’OICS, Jagjit Pavadia.   

Augmentation des urgences médicales et des accidents de la route  

Les rapporteurs notent que dans toutes les juridictions qui ont opté pour la légalisation, les problèmes de santé liés au cannabis ont augmenté.  

Entre 2000 et 2018, les admissions médicales mondiales liées à la dépendance au cannabis et au sevrage ont été multipliées par huit. Les admissions pour des troubles psychotiques liés à cette substance ont quadruplé dans le monde. 

Ils rappellent que les jeunes, dont le cerveau est encore en développement, sont particulièrement touchés par les effets négatifs sur la santé de la consommation habituelle de cannabis. Avec des incidences possibles sur leurs résultats scolaires et leur comportement social.  

De plus, des données statistiques provenant du Colorado (États-Unis) montrent que les accidents de la route mortels impliquant des conducteurs sous l’influence du cannabis ont presque doublé de 2013 à 2020. 

 

La légalisation ne tient pas ses promesses 

Le principal objectif déclaré par les gouvernements pour justifier la légalisation était de réduire les activités criminelles et d’accroître la santé et la sécurité publiques. Or, dans son rapport 2022, l’OICS souligne que cet objectif n’a pas été atteint. 

« Les données suggèrent que la légalisation n’a pas contribué à dissuader les jeunes de consommer du cannabis, et que les marchés illicites persistent », a affirmé Jagjit Pavadia. 

Les données montrent que l’offre illégale se maintient à des niveaux élevés dans toutes les juridictions de légalisation, atteignant 40% au Canada, près de 50% en Uruguay et même 75% en Californie. 

La génération de recettes fiscales a été citée comme un autre objectif important par les gouvernements qui ont encouragé la légalisation. L’OICS constate que, bien que les recettes fiscales provenant de la vente de cannabis aient augmenté d’une année à l’autre au Canada et aux États-Unis, elles s’avèrent inférieures aux prévisions, ne représentant que 1 % du budget des États qui ont opté pour la légalisation.  

Manque d’études fiables 

L’OICS s’inquiète de la tendance d’un petit nombre de gouvernements à légaliser officiellement le cannabis à des fins récréatives, alors que les traités de contrôle des drogues exigent que l’usage des stupéfiants soit limité à des fins médicales et scientifiques.  

Il encourage les Etats à mieux observer les effets de la consommation de cannabis sur les individus et la société avant de prendre des décisions légales à long terme mais remarque aussi que ces informations sont souvent insuffisantes, soit parce que les données transmises par les pays sont limitées ou trop récentes, soit parce que les lois varient trop d’une juridiction à l’autre et rendent difficiles les comparaisons ou les prévisions.  

 

L’option de la dépénalisation 

Dans son rapport, l’OICS rappelle aux États membres que la légalisation du cannabis à des fins non médicales viole les conventions sur les drogues. Mais il souligne que ces conventions proposent des moyens divers pour traiter des infractions liées au cannabis 

 « Le système fondé sur les conventions offre aux États une grande flexibilité pour protéger les jeunes, améliorer la santé publique, éviter les incarcérations inutiles et lutter contre les marchés illicites et la criminalité connexe », a souligné le président de l’OICS, en encourageant particulièrement l’option de dépénalisation de la consommation personnelle de cannabis choisie par certains pays. 

Pressions de l’industrie du cannabis 

L’OICS note que le potentiel de croissance et de profits motive de grandes entreprises à étendre leurs activités sur les marchés émergents du cannabis médical et adulte dans le monde entier et à faire pression pour lever les contrôles sur le cannabis. 

Aux États-Unis, la vente légale de produits du cannabis est l’un des secteurs qui connait la croissance la plus rapide, générant des ventes de 25 milliards de dollars en 2021, soit une augmentation de 43 % par rapport à l’année précédente. 

L’OICS réitère que la culture et l’utilisation du cannabis à des fins médicales sont autorisées, pourvu que certaines conditions des conventions soient remplies comme l’octroi de licences, des contrôles nationaux et la communication d’estimations des besoins médicaux à l’OICS. Or, le rapport note que dans certains États, les programmes de cannabis médical échappent à ces contrôles et aux normes de l’OMS relatives à la fabrication et à la prescription. 

 

Pénurie d’analgésiques 

L’utilisation médicale des substances contrôlées nourrit un rapport annexe de l’OICS, qui déplore, lui, la pénurie dans de nombreux pays d’analgésiques opioïdes nécessaires au traitement de la douleur.  

Alors qu’on ne manque pas de matière première opiacées, l’OICS, comme l’Organisation Mondiale de la Santé, constatent par exemple des disparités régionales pour l’accès aux médicaments contenant de la morphine, surtout disponibles dans les pays à revenus élevés. 

Ce rapport souligne que les situations d'urgence augmentent le besoin mondial de médicaments contrôlés pour la gestion de la douleur, l'anesthésie, les soins chirurgicaux et palliatifs et pour le traitement des troubles mentaux et neurologiques, et donne aux gouvernements des recommandations pour améliorer la disponibilité de ces médicaments essentiels.  

 

ONU INFO

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