Un musée dans chaque école en Haïti: ou l’art de rentabiliser la mémoire de l’institution

Durant la première semaine qui ouvre la nouvelle année scolaire, les administrations des établissements scolaires en Haïti auraient grandement intérêt à organiser une exposition thématique sur l’histoire et/ou l'évolution de l’institution, au profit tant des anciennes que des nouvelles cohortes, et en particulier des parents et de tous les autres membres de la communauté d’accueil de l'établissement scolaire.

Dans une exposition unique, inédite et qui serait proposée chaque deux ans, chaque dix ans, ou durant une période à déterminer, l'école se donnerait pour obligation de ne pas organiser la même exposition chaque année pour ne pas tomber dans la facilité et la monotonie, jusqu’à tuer l’envie de découvrir et le sens de la curiosité des publics ciblés.

Découvrir une exposition à l'école pour qui et pourquoi ?  Pour quel public ?  Et comment cette activité culturelle, éducative, artistique, scientifique et  médiatique devrait-elle renforcer l’image de l’institution et rentabiliser ses actifs ?

D’abord comme toute exposition, l'école commencera par définir les principales thématiques qui pourraient renforcer son image de marque au sein de la communauté, en se basant sur les archives publiques de l'établissement, en se basant sur l’histoire de l’institution et ses liens avec l’ensemble des familles et des secteurs d'activités économiques, politiques, professionnelles, entre autres.

Des actifs de l'école à mettre en valeur ? Pourquoi et comment ?  D’abord, on pensera à mettre en avant la liste des élèves qui ont fréquenté l’institution dans le temps. Si de nos jours la situation de l'insécurité ne peut en rien encourager une telle visibilité pouvant jusqu'à fragiliser la sécurité de certaines familles, on ne pourrait pas s'empêcher des mois et années après de mettre en valeur l’apport de certains anciens élèves de l’école, sur le plan académique, sportif, culturel, intellectuel, du leadership ou le social.

Découvrir l’enfance et les aspects positifs des dirigeants actuels aurait pu aider à renforcer le capital social de l’institution, en sachant bien maîtriser l’utilisation intelligente des informations entre le passé et le présent. Que deviennent les anciens établissements scolaires qui ont été fréquentés par les anciens chefs d'État et Premiers ministres, ou d'autres personnalités et célébrités haïtiennes ? 

D'autres éléments historiques et archivistiques peuvent aussi servir dans la promotion de l'héritage symbolique de l'établissement scolaire. On peut citer les trophées qui témoignent de l’excellence de l'école dans le domaine sportif ou intellectuel.

Défendre la place d’un coin d’information sur l’histoire de l'école, encourager l'aménagement d’une salle d’exposition sur l'évolution de l'école, et promouvoir l’histoire de l'école à travers un site internet et les réseaux sociaux autour d’un ensemble d'activités socioculturelles, éducatives et médiatiques sont parmi les initiatives qui mériteraient une place importante dans l’agenda des responsables des établissements scolaires.  

Dans le paysage des institutions scolaires en Haïti, rares sont celles qui mettent en valeur sur le plan social et médiatique l’anniversaire de l'établissement. Or, c’est l’occasion ou jamais pour cette institution d’investir un minimum sur le plan du marketing scolaire pour renforcer leur image de marque au sein de la communauté, du pays, ou de la ville.

Dans le cadre de ces commémorations pour marquer la création de l'établissement scolaire, l’anniversaire de la mort du fondateur, la première Victoire de l’institution dans un championnat national ou même un drame survenu à l'école, elles seront nombreuses les familles qui seraient touchées par cette actualité et qui seraient tournées vers un réveil du sentiment d’appartenance et participer dans une nouvelle promotion positive de l’institution, si cette dernière dispose de plus d’actif que de passif dans les relations parents-école, école-communauté.

Dans chaque école partout dans le monde, et pourquoi pas en Haïti, il existe une base de données importante qui se renouvelle chaque nouvelle année académique, mais aussi qui disparaît par oubli, par négligence, par l'incompétence et par l'ignorance des responsables de l’administration, du personnel des enseignants, des élèves et de leurs parents en général. Quelles sont ces données aussi importantes ? Quelles sont ces sources de documentations ? Quelles sont ces informations aussi pertinentes ? Quels sont ces éléments qui peuvent constituer de véritables collections pour monter une salle d’exposition, un petit musée au sein de l'école et pourquoi pas le grand musée de l'éducation dans la ville ?

Des responsables d'école et des professeurs, et même des parents qui ne savent pas si l'année scolaire s’ouvrira dans les prochains mois, se demanderont certainement si l’auteur de ce texte ne vit pas dans les nuages, en ce moment avec tout ce qui se passe dans la capitale haïtienne, comme si Haïti se résumait au département de l’Ouest ?  Et comme si tôt ou tard, la situation n’allait pas avoir une issue pour le bien-être des familles et le développement de nos communautés ?  Et c’est justement l’absence d'une culture de l’histoire, d’un apprentissage du passé qui empêche autant  à certains de nos dirigeants et familles de comprendre que toutes les grandes nations et les sociétés modernes sont passées par des moments pareils.

Dans une école qui prépare les générations présentes et futures, la valorisation de culture de la mémoire de l’institution sous forme de patrimoine collectif et de bien commun devraient grandement aidé les enfants et leurs parents, les professeurs et les directeurs d'école, les familles et la collectivité à prendre en compte la place et la présence de chaque individu, de  tous les acteurs, de tous les groupes qui constituent l’ensemble, le corps social.  

Dans chaque ville du pays, en dehors des institutions culturelles qui évoluent depuis des années, les écoles pourraient ainsi contribuer dans la vie culturelle de la communauté, en proposant des offres culturelles de qualité aux élèves et leurs familles. En dehors des frais scolaires qui pourraient véritablement prendre en compte la rubrique de la promotion de la vie culturelle au sein de l'école, ces nouvelles activités culturelles qualitatives proposées par chaque école pourraient ainsi devenir rentables pour l’institution, en passant par le financement, le sponsoring, le don des parents et des particuliers, la participation bénévole des élèves et l’ensemble du personnel dans la constitution, la valorisation, la vulgarisation et la diffusion des éléments du patrimoine de l'école à travers des expositions, des publications et animations que seul le petit musée dans chaque école peut offrir.

 

Dominique Domerçant

LAISSEZ UN COMMENTAIRE

0 COMMENTAIRES