125 gourdes pour un dollar américain !

La politique de fixation du taux de change est un problème majeur dans l’économie haïtienne. Mis à part le montant fixé par la Banque de la République d’Haïti (BRH), les variations sont faites en fonction du lieu et de l’entreprise en question. Sur le marché informel, un dollar s’achète à 120 gourdes, dans certains magasins à 125 gourdes alors que le taux de référence calculé par la BRH pour ce lundi 23 mai 2022 est de 110,06 gourdes pour un dollar américain.

Depuis le début de l’année 2022, le dollar américain ne cesse de varier sur le marché mondial. Selon les chiffres mondiaux, la hausse du dollar est généralisée : 8,2 % face à l’euro et au franc suisse, 9,7 % face à la livre sterling et 13,1 % face au yen japonais. Par rapport à la guerre entre la Russie et l’Ukraine, les perturbations constantes au niveau du commerce international risquent de provoquer une récession technique dans plusieurs économies des pays développés. Par conséquent, l’inflation aux États-Unis et la baisse des activités financières ont ralenti les échanges commerciaux depuis la crise sanitaire de la COVID-19 en 2020, et  sont à la base d’une augmentation et de la rareté du billet vert dans divers coins du monde.

Par ailleurs, en Haïti, selon l’économiste Kesner Pharel, cette rareté du dollar américain s’explique surtout par un manque des investissements directs étrangers (IDE). « Avec la vague déferlante des kidnappings et de l’insécurité, les membres de la diaspora rentrent de moins en moins au pays. Les touristes ne viennent pas. Les investissements sont considérablement réduits,  il manque le passage de main en main du dollar américain sur le sol haïtien », a-t-il indiqué. Ces IDE sont passés de 25 millions de dollars américains en 2020 tandis qu’en 2021 ils ont atteint 51,3 millions, une augmentation de 105,2 %, selon les chiffres libérés par l’Institut haïtien de statistique et d’informatique (IHSI). En effet, les divers transferts de la diaspora qui ont dépassé quatre milliards en 2021 n’étaient pas assez pour satisfaire la demande en cash. 

Face à ce problème de la liquidité du dollar sur le marché pour les importations, les commerçants sont de plus en plus furieux. La décision prise par l’administration de Jovenel Moïse pour ne pas livrer le dollar aux bénéficiaires accable de plus en plus le prix des produits. « Les responsables des magasins savent qu’ils vont acheter le dollar à un taux très élevé, ils nous font payer le pot cassé », a précisé Idiana, une commerçante de produits alimentaires.

Pour pallier les différents problèmes liés à l’importation,  la BRH a vendu au cours de l’année 2021, 700 millions de dollars. Un montant qui a été  largement inférieur à la demande du marché. La BRH a dû aussi puiser dans ses réserves pour payer les importations de produits pétroliers. Les effets de ces transactions spécifiques se font sentir sur le taux de change sans négliger le large déficit de la balance commerciale de près de quatre milliards de dollars américains en 2021.

 Par contre, pour gérer la cherté de la vie où plus de 50 % du revenu mensuel de plus de 90 % de la population est consacré à la consommation, les entreprises de la place affichent le taux de change qui leur convient, contrairement aux taux affichés par la BRH. Le prix maximal pour un dollar sur le marché atteint 125 gourdes, une variation de plus de 23 % par rapport à l’année précédente. 

 

Oberde Charles

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