Balade mystique avec James Germain !

Dans une rencontre entre le temps et l’espace, l’artiste James Germain nous invite dans une ballade mystique sans pareil. Il raconte, il décrit, il invite, il invente, il réinvente le décor de la vie nocturne en Haïti. En route vers l'ultime rendez-vous à : « Kafou minwi ».

Des plages d'expressions populaires, de symbolisme et de questionnement prennent place dans le refrain de cette chanson, qui devrait faire peur, mais pourtant avec la voix d'un samba aussi pénétré dans la sauce des Lwa, James Germain arrive à faire chanter, danser et rêver. 

Désormais, le diable qui gouverne la nuit s’est trouvé un véritable porte-parole pour tenter de déconstruire la peur et les mythes, même si l'interprète persiste dans ses avertissements: « Si w tonbe nan kafou minwi, sonje…?», et la chorale réplique: « Lè sa wa vann manman w... » 

Défilé d’une bande sans nom, qui avance dans des pas de danse traditionnelle, et dans tous les sens, lance des messages suivant des codes mythiques et mystiques. Je me souviens de ces belles aventures scientifiques et touristiques offertes lors des sorties académiques au département d'anthropo-sociologie de la Faculté d’ethnologie.

Dans cette tournée nocturne, qui porte tous les noms et les missions les plus secrètes pendant la nuit, chaque étudiant conscient et vigilant, cherchait à capter et à mémoriser dans les moindres détails, la science des Lwa et les technologies du Vodou. C'est pratiquement ce que décrit cette douce mélodie signée James Germain, dans son plaidoyer de faire accepter la culture ancestrale comme un produit de luxe !  

Dans cette nouvelle invitation lancée à travers les couleurs traditionnelles des Lakou, l'artiste interprète emprunte des verbes et un vocabulaire populaire très riche et symbolique. 

Des rendez-vous dans la vie intime, mondaine et nocturne, temporelle et spatiale portent chacune une récolte. L’artiste inaugure cette composition en rappelant: « Nan randevou lanmou, Nan randevou lajan, Nan randevou Vodou, Nan randevou chak jou, Nan randevou lanni, Nan kalfou….».

Des rendez-vous qui se précisent dans un protocole Vodou non des moindres, avec sa préséance et ses exigences. « Nan randevou lanmou, yo pale bèl franse pou gran mèsi. Nan randevou lajan yo konte kalkile, pa gen zanmi. Nan randevou vodou yo chante met agwe…..».

De « Nan randevou » à « Nou prale », c’est la marche de la vie et du renouvellement des forces suprêmes du temps, qui prennent forme dans cette douce mélodie qui porte le souffle de celui qui a su insuffler une énergie sans pareille à l’hymne national d’Haïti, dans un duo avec le célèbre pianiste Mario Canonge, comme un hommage caribéen à la contribution d’Haïti dans la dignité humaine.  

D'autres interprétations aussi inédites qu’inspirantes charrient l'onde musicale de James Germain, vont s’inscrire dans la musique populaire pour en devenir des classiques. 

Du Vodou aux couleurs de jazz et de compas, l'artiste sait aussi parler de coeur et d'amour, en voyageant entre les émotions et la timidité, pour accoucher, il y a quelques années plus tôt, une perle titrée : « Mwen renmen w ». 

Des paroles simples et pleines de saveurs vont jusqu'à rappeler certains souvenirs d'enfance. “ Ou ale, ou tounen, ou fè lago nan vi m….Men, mwen pa sa di w mwen renmen w ».  

Dommage qu’une telle poésie musicale ne bénéficie pas d’autant d’aura dans les médias au temps de la Saint-Valentin. 

Depuis plus de trois décennies, James Germain nous livre ces compositions et interprétations, ces recherches en Haïti et ailleurs, et des innovations artistiques qui confirment la qualité authentique de cet artiste qui veut rester unique, James Germain. 

Dans un coin réservé de la capitale, lors d'un « Jeudi après midi avec James Germain à la maison Dufort (une extension de la Fokal), il était là dans sa robe noire, entouré d’un public sélectif, à faire écho de son message mystique, tout en partageant ses nuages de danses ancestrales dans le ciel de nos souvenirs des festivités dans les Lakou Vodou.  

Dans «Kréol Mandingue», c'est une nouvelle dimension qui est franchie par l'artiste chercheur. Les compositions et interprétations au nom de code: «Divinò», «Nago, Nago», «Nou prale», et plusieurs autres créations et adaptations du Vodou haïtien, sont servies avec d’autres rites et rythmes des tribus et cultures croisées sur le continent de nos ancêtres africains. C'est au Mali que James Germain a concocté ce mélodieux projet artistique et scientifique.  

Décidément, James Germain se confirme comme l’une des voix masculines en solo comme en duo, qui fait écho, surtout lorsque son génie est en harmonie avec un public ouvert et respectueux des valeurs universelles et de la diversité culturelle. 

Dans l’expérience musicale de Belo, on a également retrouvé l'empreinte de James Germain, avec une reine engagée dans la musique populaire au sein de sa génération, Emeline Michel, pour chanter en choeur : “Nou se wozo, nou mèt tande nou pliye, nou pap kase ”.

Dominique Domerçant  

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